Les variants de la Covid

Par Dr Sophie Duméry -  Journaliste médecin

Théragora - www.theragora.fr - Année 2022 - Votre pharmacien vous conseille - N° 169 - Page 0

Les virus mutés de la souche originelle chinoise à l’origine de la pandémie Covid19 sont légion. Tous ces « variants » ne réussissent pas à percer. Comme les membres d’une famille nombreuse ils font plus ou moins carrière dans le monde…

 

Pourquoi le virus de la Covid19 est-il pandémique ?

Le SARS CoV 2 a plusieurs atouts. Ce coronavirus diffère beaucoup des coronavirus de rhumes banals et syndromes grippaux hivernaux. En conséquence, l’immunité humaine est surprise. N’ayant aucune mémoire de lui. Il lui faut le temps d’intégrer ce nouvel intrus à sa liste de cibles à détruire.

Le SARS CoV 2 est assez contagieux pour faire d’une épidémie chinoise régionale une pandémie (touchant toute l’espèce humaine). Le niveau d’hygiène participe à son expansion mais ne suffit pas à protéger la population. Le SARS CoV 2 entre dans le corps directement par le nez et la bouche, indirectement par les mains qui contaminent à un moment ou un autre nez et bouche. Or ces organes sociaux sont incontournables : parler, partager un repas, se serrer les mains, s’embrasser… Donc une excellente voie de contamination et de son entretien.

Le virus s’attache vite aux cellules et s’y multiplie vite avant que l’infection soit manifeste et bien visible, ce qui n’est pas le cas chez la plupart des gens : la répétition de tests biologiques devient indispensable mais difficile à gérer. Le malade est donc contagieux avant son isolement et son immunité naïve met du temps à éteindre la multiplication virale, donc la contagion.

 

Comment se transforme-t-il en « variants »?

Le mot variant est anglo-américain international. Il désigne les mutants de la souche initiale Wuhan (ville chinoise où a commencé officiellement la pandémie). Les mutations du génome viral (ensemble de ses gènes) sont un phénomène naturel et aléatoire survenant lors de la multiplication virale dans une cellule.

Mathématiquement plus il y a de cellules infectées chez une personne, plus il y a de chance qu’une mutation émerge. Plus la maladie dure par multiplication virale, plus le nombre de mutations augmente. Si beaucoup de personnes sont infectées (épidémie) ce chiffre croît exponentiellement. Si l’infection est mondiale (pandémie) il est infini. Cela justifie la vaccination de toute la population : elle réduit mathématiquement l’apparition de variants. Mais un vaccin est imparfait puisque les mutations sont nombreuses et rapides dans une pandémie. Comme le vaccin anti-grippal, la vaccination contre la Covid doit évoluer par des rappels adaptés aux variants dominants.

En outre, si les variants sont plusieurs à réussir à circuler, l’infection par tous ces variants en même temps favorise l’apparition aléatoire d’un « champion » combinant les atouts de ses « parents »… Avant qu’un variant plus performant ne le détrône.

 

Beaucoup de variants ont-ils disparus ?

Oui. Le grand public peut s’en rendre compte en regardant attentivement les archives médiatiques. La série des alertes successives aux variants anglais, indien, sud-africain, etc. donne une bonne idée de leur brièveté dans la population, comme des vedettes de la chanson à la célébrité d’étoile filante. Omicron (nouvelle lignée virale) et son « fiston » (sous-lignage) BA2 connaîtront certainement le même sort (voir schéma des mutations 2019-2020).

 

 

Un variant Covid peut-il terrasser l’humanité ?

Non. Les virus sont des micro-organismes extrêmement mutables pour permettre leur survie chez des organismes hôtes défendus par leur immunité. Celle-ci s’adapte avec efficacité : l’expansion humaine le prouve. Plus un agent infectieux est contagieux et rapidement mortel, plus son diagnostic est précoce. Qu’il soit bien soigné ou pas, le nombre de malades chute, ce qui réduit la contagion dans la population sensible et freine son expansion. Finalement l’épidémie s’éteint parce que la population est soit immunisée/guérie, soit décédée.

Cela a été le cas pour le coronavirus pandémique SARS CoV (1), parti de Chine lui aussi et qui n’a pas de réservoir animal (espèce tolérante) pour ressurgir inopinément chez des humains en contact avec lui. En revanche le MERS CoV, cousin des SARS CoV, est hébergé par les dromadaires et transmissible à l’Homme : le foyer saoudien initial n’est pas éteint et ne le sera sans doute jamais.

 

Comment surveille-t-on les variants ?

L’agence Santé Publique France est en charge de la surveillance épidémiologique. Les informations sont recueillies par des réseaux hospitaliers et en ville. Encore faut-il qu’elles soient pertinentes. Les chiffres de la maladie Covid19 ne suffisent pas, il faut identifier le virus en cause chez chaque malade pour dépister les mutants/variants. Or la validité des tests biologiques varie selon la technique utilisée. Le variant Omicron déjouant les produits sur le marché il faut en fabriquer d’autres. Cela allonge le temps de réaction sanitaire alors que l’habileté consiste à obtenir à un coût acceptable un panorama géographique exact des virus en temps réel.

La pandémie éclaire les faiblesses de notre épidémiologie expliquant des incohérences sanitaires. Le gouvernement doit se fonder sur des connaissances scientifiques parcellaires et/ou discutées alors que l’enjeu politico-économique pèse sur les décisions. Les tensions sont fortes, par exemple, sur le séquençage du génome viral, considéré comme solution parfaite en surveillance épidémique.

 

Qu’est-ce que le séquençage du génome viral ?

L’échantillon infectieux prélevé sur le malade est envoyé à un laboratoire disposant du matériel automatisé capable de décrypter à la chaîne 24h/24 la totalité des gènes viraux, qui constituent une identité ultime fiable. Lors d’une épidémie, le nombre de centres de séquençage est donc critique. S’il y a peu de foyers (ou clusters) avec un nombre restreint de malades, les centres de référence de l’agent infectieux suffisent à analyser les échantillons prélevés. On utilise plutôt des méthodes moins coûteuses mais suffisamment fiables : tests de laboratoire routiniers par techniques variées (antigénique, RT-PCR) qui n’offrent pas le même degré de certitude.

La Covid19 exposant toute la population à un risque possiblement grave (facteurs de risque) et à des arrêts maladie capables de paralyser le pays, l’idéal est de tester tout le monde régulièrement. Les tests les plus rapides, faciles, et peu coûteux atteignent ici leurs limites : des erreurs en petit pourcentage deviennent considérables en valeur absolue (plusieurs centaines de milliers pour 68 millions d’habitants). Il faut passer à la catégorie supérieure, le séquençage génomique plus ou moins complet. La France ne dispose pas d’assez de plateformes de séquençage pour être « sur les talons » des variants effectivement présents. La situation s’améliore mais reste insuffisante pour maints experts.

 

La pandémie covid19 était-elle prévisible ?

Oui. Les épidémiologistes savent depuis longtemps modéliser l’apparition par vagues d’épidémies dans une population animale/végétale. Mais les gouvernements se préoccupent surtout des épidémies saisonnières qui les confrontent à leur retour rapide. Les vagues plus rares (concernant à leur yeux leurs successeurs aux affaires) ont beaucoup moins d’impact sur leurs décisions et leur préparation à une crise sanitaire pandémique.

 

 

 

Références

  • Covid-19, point épidémiologique. Santé Publique France, 20 janvier 2022
  • Réalités biomédicales, blog du Dr Marc Gozlan. Site du Monde.fr
  • Analyse de risque des variants émergents du SARS-CoV-2. Santé publique France et CNR des virus des infections respiratoires, 5 janvier 2022
  • Documents d’information sur le nouveau coronavirus (2019-nCoV). OMS, décembre 2021.
  • Phylogenetic analysis of SARS-CoV-2 in Boston highlights the impact of superspreading events. Science, 5 février 2021
Les entretiens de Théragora
Les robots s'imposent dans le bloc opératoire
Les robots assistants chirurgiens sont désormais très présents dans les salles d'opération des hôpitaux. Associés à l'intelligences artificielle et à la réalité virtuelle, ils ouvrent la voie à la chirurgie cognitive de quatrième génération.
Archives vidéos Carnet Le Kiosque Théragora Mots de la semaine Derniers articles en ligne
Contactez-nous

Théragora est le premier site d'information sur la santé au sens large, qui donne la parole à tout ceux qui sont concernés par l'environnement, la prévention, le soin et l'accompagnement des personnes âgées et autres patients chroniques.

contact@theragora.fr

www.theragora.fr

Suivez-nous et abonnez-vous sur nos 5 pages Facebook

Facebook Théragora
Facebook Théragora Prévenir
Facebook Théragora Soigner
Facebook Théragora Acteurs de ma santé
Facebook Théragora Soutenir

Linkedin Théragora