Quelle peut être la place du numérique et des dispositifs médicaux (DM) dans un système de santé en pleine évolution ? Le Snitem peut-il aider à faire évoluer les organisations et la façon dont les acteurs de soins travaillent ensemble ?
Stéphane Regnault, son président et président du directoire de Vygon, en est persuadé : « Le dispositif médical absorbe aujourd’hui toutes les technologies du numérique : acquisition de données, communication, analyse de ces données. Cette intégration pose des questions sur la place du médecin vis-à-vis de l’algorithme ou de la machine, sur le partage de responsabilités. Une évolution des frontières qui sera débattue tout au long de cette journée ».
La sixième édition des Rencontres du Progrès Médical (RPM6) illustre la force d’innovation du secteur des DM dont la particularité est de réunir des dispositifs très divers, allant du pansement à la valve cardiaque, en passant par les équipements d’IRM. Le programme des RPM6 reflétait cette dynamique avec la présentation de cinq start-ups – SoftBank Robotics, Biomodex, Diabnext, Openhealth, et Rhizom-Medical – qui rythmait la journée.
Télésuivi de patients apnéiques grâce à des dispositifs connectés, intelligence artificielle en imagerie pour améliorer le diagnostic ou le suivi d’un patient, assistance physique aux personnes âgées avec un robot, ou encore évaluation de l’impact d’un dispositif grâce à l’analyse des données de santé : le numérique et le DM sont d’ores et déjà intimement liés. Les apports et le potentiel de ces technologies dans le secteur du DM listés au cours de cette journée d’échanges ont été d’ailleurs nombreux :
Parmi les champs à explorer, la valorisation des millions de données collectées en vie réelle est un gisement immense d’avancées et d’innovations en santé, or leur accès et sa gouvernance sont toujours largement débattus. L’un des enjeux forts du Health Data Hub est non seulement d’harmoniser les hébergements, la sécurité, la qualité et l’interopérabilité mais surtout de savoir qui régira tout cela pour promouvoir un usage commun. En rupture avec le cadre actuel ou en complément, deux sociétés – Embleema et 23 consulting - ont par ailleurs présenté des modèles ouverts de blockchain avec des patients en charge de la valorisation de leurs données de santé.
Nombreux sont les intervenants des RPM6 qui ont appelé à entrer dans une logique collective et prospective avec toujours pour objectif ultime : mieux soigner. Un équilibre est à trouver entre des solutions faciles, ergonomiques, mais aussi un schéma d’organisation commun, des normes d’interopérabilité. Ce levier du numérique nécessite non seulement une réorganisation des façons de travailler, mais aussi une redéfinition des rôles de chacun et un partage de la valeur à examiner à nouveau. Et c’est sans doute là le plus difficile, la transformation des organisations comme l’ont souligné les intervenants.
Impossible de parler du numérique et de l’intelligence artificielle sans aborder les questions éthiques tels la délégation de décisions du médecin à l’algorithme, ou le risque de minoration de la valeur de la personne dans une analyse à échelle d’une population. Au-delà de ces réflexions, la question plus générale concernant les récents développements de l’intelligence artificielle est de savoir pourquoi les utiliser : gain de temps dans des tâches à plus haute valeur ajoutée, aide au diagnostic ou transformation des capacités des êtres humains ? Ce questionnement éthique, sociétal a été abordé par plusieurs tables rondes ou intervenants de ces Rencontres du Progrès Médical.
Pour résumer cette journée riche en débats : il est temps de sortir le numérique de cette phase de fascination (technologique, éthique…) pour proposer des outils simples à intégrer, qui répondent à des besoins réels. Pour cela, il est indispensable dans chaque projet mené d’impliquer professionnels de santé et patients. Les différents intervenants, représentants du Snitem, ont également rappelé l’importance de simplifier les contraintes réglementaires pour favoriser l’innovation, et transformer les forces d’aujourd’hui dans le numérique et les DM en progrès médicaux pour les patients.
« Nous devons apprivoiser le numérique au niveau médical, économique et éthique pour donner à notre pays le rayonnement qu’il mérite dans ce domaine », a conclu Stéphane Regnault.