LABORATOIRES DE BIOLOGIE MEDICALE EN GREVE - L'appel de 4 syndicats SDB, SNMB, SLBC, SJBM et l’Association pour le Progrès de la Biologie Médicale

Et si demain les laboratoires de biologie médicale de proximité disparaissaient ? 

- Théragora le 18 septembre 2019 N° 25 - Page 0

Les 4 syndicats de biologistes -SDB, SNMB, SLBC, SJBM et l’Association pour le Progrès de la Biologie Médicale unissent leurs voix et dénoncent l’annonce d’une baisse de 170 millions d’euros du financement de la biologie médicale en France et les risques majeurs que cela peut engendrer sur les laboratoires de biologie médicale et le suivi médical de la population. 

 

 

La décision de la CNAM concernant les dépenses de biologie médicale 

Dans son rapport annuel sur les charges et produits de l'assurance maladie diffusé fin juin, la CNAM a indiqué prévoir 170 millions d'euros d'économies en 2020 sur les dépenses de biologie médicale. C’est presque le double du montant de 95 millions d’euros qui avait été appliqué sur la période précédente, venant s’additionner au milliard de baisse cumulée depuis 10 ans. Les dépenses de biologie médicale étaient déjà strictement contenues depuis 6 ans par les précédents protocoles d’accords triennaux signés par les syndicats professionnels via l’accord triennal 2016/2019. Ces accords ont pour principe de limiter la progression annuelle de la dépense des actes de biologie médicale à +0,25% par an par une baisse systématique de la tarification d’une sélection d’actes de biologie médicale parmi les plus fréquemment prescrits. Le secteur de la biologie médicale fait exception en étant la seule activité de soin conventionnée dont le montant des examens remboursés par l’Assurance Maladie n’a pas l’autorisation de progresser sur la base de l’Ondam fixé suivant les années entre +2.3 à +2.5%/an de progression. Les représentants des biologistes évaluent que cette nouvelle baisse représentera pour 2020, une nouvelle baisse de 4,8% de l’enveloppe totale, impactant directement le chiffre d’affaire des laboratoires. La dépense de biologie médicale ne représente pourtant en France aujourd’hui que 1,8 % des dépenses courantes de santé et 2,2 % de la CSBM (consommation de soins et de biens médicaux)1, soit un montant remboursé de 3,731 milliards d’euros, un montant comparable à d’autres pays comme l’Allemagne. 

 

170 millions d'euros d'économies en 2020 sur les dépenses de biologie médicale, un montant déconnecté de tout réalisme médico-économique 

 

Les conséquences de cette décision pour les laboratoires de biologie médicale non hospitaliers 

La biologie médicale privée en France est une composante importante du système de santé et de l’organisation des soins. Elle concourt à 70% des diagnostics médicaux, au dépistage, à l’évaluation des risques, au suivi des patients. Elle est réalisée en France pour plus de 60% dans le domaine privé, un pourcentage important comparé à d’autres pays où le secteur public en prend une plus grande partie en charge. 

Pour faire face à l’enjeu de la maitrise des coûts imposée par les pouvoirs publics, la biologie médicale s’est massivement restructurée en structures multi-sites autour de plateaux techniques performants et accrédités suivant la norme ISO15189, ce qui a représenté un investissement financier et humain des biologistes considérable en un temps très court. Le nombre total de laboratoires de biologie médicale est ainsi passé de 4 000 en 2008 à moins de 500 structures aujourd'hui, résultat des multiples fusions de laboratoires intervenues dans le secteur privé. Le nombre de sites de prélèvements de proximité est resté globalement stable à environ 4000 sur l’ensemble du territoire français. 

Cette baisse de la NABM (Nomenclature des Actes de Biologie Médicale) de 170 millions d’euros pour 2020 est inédite par son ampleur et s’annonce comme une difficulté économique majeure pour la profession, laquelle s’est pourtant jusqu’alors toujours adaptée aux besoins et aux évolutions du système de santé. Elle s’est largement modernisée, restructurée, tout en maintenant, au maximum, un fonctionnement de qualité, de proximité et d’innovation. 

Cela impactera considérablement les 452 sociétés d’exercice libéral (SEL) de biologistes : environ 200 d’entre elles seront touchées de plein fouet et susceptibles de fermer. 

 

 

Cette réduction de 170 millions d'euros mettrait directement en danger l’existence de 200 sociétés d’exercice libéral (SEL) de biologistes. 

 

Les biologistes en colère 

Les laboratoires de biologie médicale considèrent qu’ils sont arrivés au bout de la rationalisation de leur activité et ne peuvent économiquement plus compenser l’augmentation de leur charge de travail et de leurs coûts. Les contraintes financières et normatives que la profession a dû intégrer depuis de nombreuses années ont progressivement réduit toute possibilité de nouveaux gains de productivité. 

Toute nouvelle restructuration se traduira donc nécessairement par des ajustements économiques plus drastiques, en particulier par la fermeture complète de sites de proximité, aujourd’hui à la limite de la rentabilité, le licenciement de salariés et une perte de qualité des services de santé délivrés

Les restrictions imposées ces six dernières années ont déjà̀ entrainé́ des dégradations de services en augmentant les délais de rendu de résultats d’examens, notamment urgents et sous la forme de fermetures partielles ou totales de certains petits sites jugés insuffisamment rentables. 

Si le Gouvernement souhaite une biologie de proximité, innovante et d’excellence, il faut que les jeunes s’investissent. Or, on ressent d’ores et déjà les conséquences de cette dégradation du secteur en constatant qu’elle ne les attire plus, ce qui fragilise de fait l’avenir de la profession. 

 

Cette nouvelle baisse de la NABM fragilisera encore davantage la profession et aura des conséquences sur la qualité des services de soin, notamment de proximité 

 

Décision de grève nationale des laboratoires de biologie médicale 

La Cnam n’ayant pas modifiésa position lors de la réunion du 11 septembre, les laboratoires appelentàune fermeture des laboratoires de biologie médicale tous les après-midis àpartir du 23 septembre jusqu’au 1eroctobre 2019. 

Les urgences biologiques ne seront pas assurées.

Cette grève sera reconductible selon les décisions d’un deuxième RDV le 1eroctobre. 

 

 

Ce que veulent les biologistes 

Les biologistes demandent à l’Assurance Maladie de leur allouer des moyens financiers pérennes sur la base de la progression autorisée par l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) afin de leur permettre de maintenir la même offre et qualité de soins pour leurs 500 000 patients quotidiens. 

 

 

 

Focus sur le poids médico-économique du secteur de la biologie médicale 

Les analyses de biologie médicale pratiquées hors établissements de soins ont généré 4,4 milliards d’euros de dépenses en 2016 dont 3,731 milliards d’euros pris en charge par l’Assurance Maladie. Ce chiffre d’affaire est globalement stable depuis la mise en place des deux plans successifs d’accords triennaux. 

Depuis une dizaine d’années, la profession s’est largement restructurée : le nombre de structures juridiques est ainsi passé de 2625 en 2009 à 385 en septembre 2019 mais le nombre de sites de proximité est resté identique, près de 40002, dans lesquels travaillent près de 48 000 salariés3. Par ailleurs, le nombre de plateaux techniques, a considérablement diminué, passant de 1700 en 2012 à environ 800 en 2017. Les laboratoires de 50 à 199 salariés concentrent la moitié du chiffre d’affaires de la profession. 

Alors que le nombre de sites demeure relativement stable (+ 0,5 % à un an d’intervalle et + 1 % par rapport à 2012), le nombre de sites par entreprise progresse significativement passant de 2,5 en 2012 à 6 en 2017. Malgré la stabilisation du nombre de sites de biologie médicale, il existe des disparités régionales. Certaines régions dans le centre et l’ouest de la France sont sous-équipées et donc déjà fragilisées en termes d’accès aux soins. Rapport de branche Laboratoires de Biologie Médicale Extra Hospitaliers Répartition des sites* selon les régions * parmi ceux employant au moins un salarié Hauts de France Centre - Val de Loire Bretagne Nouvelle Aquitaine Corse Occitanie Auvergne - Rhône-Alpes PACA Ile de FranceNormandie Bourgogne - Franche-Comté Grand Est 270 148 141 302 731 124 131 402 538 355 311 22 (7,5%) (4%) (8,5%) (3,5%) (3,5%) (4%) (8,5%) (10%) (11%) (15%) (0,5%) Pays de la Loire 152 (4%) (20%) 500 sites et plus 200 – 500 sites Moins de 200 sites Chapitre 2. Dénombrement de la profession 2.2 – Les sites (source ACOSS/I+C) (source ACOSS/exploitation I+C; code NAF: 86.90B Laboratoires d'analyses médicales) 15/69 Répartition des sites selon les régions Rapport de branche Laboratoires de Biologie Médicale Extra Hospitaliers Répartition des sites* selon les régions * parmi ceux employant au moins un salarié Hauts de France Centre - Val de Loire Bretagne Nouvelle Aquitaine Corse Occitanie Auvergne - Rhône-Alpes PACA Ile de FranceNormandie Bourgogne - Franche-Comté Grand Est 270 148 141 302 731 124 131 402 538 355 311 22 (7,5%) (4%) (8,5%) (3,5%) (3,5%) (4%) (8,5%) (10%) (11%) (15%) (0,5%) Pays de la Loire 152 (4%) (20%) 500 sites et plus 200 – 500 sites Moins de 200 sites Chapitre 2. Dénombrement de la profession 2.2 – Les sites (source ACOSS/I+C) (source ACOSS/exploitation I+C; code NAF: 86.90B Laboratoires d'analyses médicales) 15/69 

En 2017, le nombre d’actifs dans les laboratoires était de 48.077. Près de 90% des actifs sont salariés, soient 42.877 salariés au 31 décembre 2017, en progression de 1,5 % par rapport à 2016 et 3 % depuis 2012. En 2017, 83,5 % des salariés exerçaient leur profession dans un laboratoire d’au moins 50 salariés contre 76,5 % en 2015. 94% des salariés sont en CDI et plus des ••• occupent un poste à temps plein. 

La profession embauche avec la création nette de 600 postes en 2017, en augmentation de 1,5%. 

 

 

La Profession représente une activité économique conséquente et est créatrice d’emplois, majoritairement en CDI et à temps plein. 

 

Un rôle essentiel dans la prise en charge médicale et la permanence des soins 

Le vieillissement de la population française et la priorité donnée au maintien à domicile et à la chirurgie ambulatoire, augmentent naturellement les besoins en soins non hospitaliers, incluant les examens de biologie médicale réalisés dans les laboratoires. Actuellement, vingt millions de français présentent une maladie chronique dont le diagnostic et/ou la prise en charge ne sont pas effectués de façon suffisamment précoce. Les biologistes médicaux jouent un rôle essentiel dans le diagnostic et le suivi de ces patients, et il est prévu que leur rôle s’accroisse rapidement grâce à la mise en oeuvre effective du DMP (dossier médical partagé), facteur de rationalisation et d’efficience de la prise en charge. 

L’actuel maillage territorial permet aux biologistes médicaux de participer aux initiatives locorégionales sur les parcours de soins en agissant sur la prévention, la prise en charge des maladies chroniques, ainsi que sur les soins non programmés et la prise en charge des urgences. A l’heure de la désertification médicale et de la saturation des services des urgences, la présence dans les territoires des laboratoires de biologie médicale permet de répondre aux besoins croissants de santé de la population. 

La biologie médicale est une source constante d’innovations, qui font progresser non seulement les diagnostics médicaux, mais aussi les choix des thérapeutiques ciblées. Elle contribue aussi à développer une matière relativement nouvelle et prometteuse, la médecine prédictive. Ajoutons sur ce sujet de l’innovation que la biologie médicale est un sujet prioritaire pour l’intelligence artificielle et la gestion des données de santé. Pour mieux comprendre les enjeux du débat actuel, il faut mettre en perspective, la biologie médicale source de progrès et capable de bouleverser les prises en charge, et la gestion financière comptable qui veut croire ou faire croire qu’il est possible d’économiser sur ces dépenses sans léser aussi les malades. Constamment perçue comme un poste de coût, la biologie médicale française constitue au contraire un facteur d’efficience dans le système de santé. 

Enfin, les laboratoires de biologie médicale sont des structures participant activement à la continuité des soins. Ils assurent une disponibilité permanente et croissante. En 2017, 33 % des laboratoires ont eu recours au travail de nuit contre 28 % deux ans plus tôt (+ 5 points). Cette proportion croit significativement en fonction de la taille des laboratoires. Au cours de l’année 2017, plus de la moitié des laboratoires (56 %) ont eu recours au travail le dimanche contre 42,5 % en 2015 (+ 13,5 points) et 7 laboratoires sur 10 pratiquent les astreintes contre seulement 51 % en 2015. Les laboratoires de 200 salariés et plus ont davantage recours aux astreintes (82 % d’entre eux). 

La biologie médicale occupe une place incontournable dans le système de santé  sans pour autant peser considérablement sur le budget de la Sécurité Sociale 

 

 


1 Source DREES, Compte de la santé 

2 Source ACOSS, code NAF 86.908 Laboratoires d’analyses médicales 

3 Source INSEE, code NAF 86.908 Laboratoires d’analyses médicales Rapport de branche Laboratoires de Biologie Médicale Extra Hospitaliers Evolution 2012-2017 Nombre de laboratoires employant au moins un salarié Chapitre 2. Dénombrement de la profession 2.1 – Les laboratoires En 2017, la profession des Laboratoires d’analyses médicales dénombre 604 laboratoires (source INSEE), soit un fléchissement de 11,5 % à un an d’intervalle et de 57,5 % depuis 2012. 604 laboratoires employant au moins un salarié Nombre de laboratoires de la profession en 2017 (source INSEE; code NAF: 86.90B Laboratoires d'analyses médicales) 1 429 1 108 904 792 684 604 0 500 1 000 1 500 2 000 2012 2013 2014 2015 2016 2017 Nombre de laboratoires -22,5% -18,5% -12,5% -13,5% -11,5% 12/69 

 

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