« Les métiers de la pharmacie ne cessent de se réinventer. » En ouverture du 52e congrès de l’ANEPF (Association nationale des étudiants en pharmacie de France), le Professeur Françoise Dignat-George, doyen de la faculté de pharmacie de Marseille (Bouches-du-Rhône) a d’emblée posé le cadre : la pharmacie est entrée dans une période de mutations indispensables pour s’adapter aux évolutions que connait le monde de la santé.
Des évolutions qui s’apparenteraient mêmes à des « révolutions au regard du chemin parcouru depuis la reconnaissance du droit de substitution, en 1999 et le vote de la loi HPST (Hôpital patients santé territoires), en 2009 » a ajouté la présidente de la conférence des doyens, Marie-Christine Woronoff-Lemsi. Pas question pour autant de légitimer ou de rejeter un allongement de la durée des études. « La conférence des doyens de pharmacie n’a pas de position définie sur le sujet » a tenu à rappeler la présidente de la conférence des doyens.
Rien d’étonnant, puisque le groupe de travail qui devait réfléchir à l’évolution du troisième cycle des études de pharmacie, sous l’égide du Professeur Dominique Porquet, n’a toujours pas été constituée, faute de lettre de mission. Et malgré « un lobbying intense » de Christine Woronoff-Lemsi, la Commission nationale des études de médecine, maïeutique, odontologie, pharmacie (CNEMMOP) ne semble pas prête à lier les évolutions des deux troisièmes cycles. Pour la présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens, Isabelle Adenot, « dans le contexte actuel, l’allongement des études de pharmacie risque de casser la mixité sociale et l’ensemble des sections de l’Ordre s’est prononcé contre cette mesure inappropriée ».
Selon la présidente du Cnop, la profession n’en a pas pour autant terminé sa révolution. Trois éléments devraient ainsi fortement influer l’exercice pharmaceutique : le numérique, qui va changer en profondeur la relation au patient ; la place prépondérante des pathologies chroniques, qui va bouleverser en profondeur le système de santé et le départ à la retraite de plus de 4 000 pharmaciens dans les trois prochaines années.
Trois bouleversements qu’il convient de mettre en regard des quatre P- préventif, Prédictif, Personnalisé et Participatif -, symboles de la médecine du futur. Un changement d’angle de vue que la présidente du CNOP partage avec la présidente des Giphar. Selon Laétitia Hible, les 4P définissent les frontières de la santé de demain et doivent orienter l’évolution du métier de pharmacien. « Il nous appartient désormais de prendre notre destin en mains et de faire évoluer notre profession dans le sens fixé par la loi HPST pour passer du cure au care. »
Un point de vue partagé également par le vice-président de l’ANEPF, Adrien Philippe, qui est convaincu que « la pharmacie de demain ne ressemblera pas à celle d’aujourd’hui car le pharmacien sera de plus en plus un prestataire de services ». Et ce prestataire de service, selon le président de PHR, Lucien Bennatan, « sera à la fois commerçant, professionnel de santé et évoluera dans un univers digitalisé. »
A charge alors aux instances de « faire évoluer les règles pour permettre aux pharmaciens de communiquer auprès du grand public pour afficher leurs spécificités », ont expliqué d’une seule et même voix les deux présidents de groupements et le vice-président de l’ANEPF. Des messages entendus par Valérie Boyer, députée de Marseille et membre de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale qui s’est déclarée « favorable à la possibilité pour les professionnels de santé de s’adresser aux patients pour défendre leur métier face à des situations concurrentielles de plus en plus vives ».