L’Office européen des brevets (OEB) a récompensé le chercheur de l’Inserm pour son Immunoscore®, un test qui permet de prédire les risques de récidive chez les patients atteints d’un cancer, au cours d’une cérémonie à Vienne.
L’invention de Jérôme Galon consiste à analyser la réponse immunitaire du patient, c’est-à-dire à dénombrer les cellules immunitaires présentes près d’une tumeurCe procédé assure un diagnostic du cancer plus précis et plus complet, permettant ainsi aux médecins de fournir aux patients des traitements efficaces adaptés à leur cas
L’excellence de la recherche française sur le cancer était particulièrement à l’honneur cette année puisqu’une autre chercheuse de l’Inserm, Patrizia Paterlini-Bréchot, était elle aussi finaliste dans la catégorie « Recherche » pour sa méthode de filtrage du sang qui permet un dépistage précoce du cancer
Au total, 5 inventeurs ont été récompensés par l’OEB pour leurs travaux exceptionnels dans les domaines du recyclage du plastique, du diagnostic du cancer, des batteries rechargeables, de l’antifouling et des tests ADN
L’Office européen des brevets (OEB) a récompensé l’immunologiste français Jérôme Galon en lui décernant le Prix de l’inventeur européen 2019 dans la catégorie « Recherche », lors d’une cérémonie qui s’est tenue aujourd’hui à Vienne. Celui-ci a mis au point un test de diagnostic du cancer basé sur la réponse immunitaire du patient. Il permet aux médecins d’avoir un aperçu plus complet de la maladie d’un patient et de lui prodiguer ainsi des traitements plus efficaces et adaptés.
L’invention de Jérôme Galon, licenciée par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et commercialisée sous le nom d'Immunoscore® par une société qu'il a co-fondée, vise à compter le nombre de cellules immunitaires présentes dans le tissu tumoral d'un patient. Des cliniques du monde entier y ont aujourd'hui recours pour prédire le risque de récidive chez les patients atteints de cancer colorectal.
« L’invention de Jérôme Galon a eu un grand retentissement dans le domaine de l’oncologie », a déclaré le Président de l’OEB, António Campinos. « Il en a résulté une révision de la classification des cancers et cela pourrait déboucher sur l'élaboration de nouveaux traitements. En créant une start-up et en recourant au dépôt de brevet, Jérôme Galon a pu commercialiser ce nouveau procédé, permettant à ses travaux de recherche d'avoir un impact utile – c'est-à-dire en aidant les gens ».
La cérémonie de remise du Prix de l’inventeur européen a réuni aujourd’hui à la Wiener Stadthalle quelque 600 invités issus des secteurs de la propriété intellectuelle, de la politique, de l’économie, des sciences et du monde universitaire. Le Prix est décerné chaque année par l’OEB afin de récompenser des inventeurs exceptionnels originaires d’Europe et du monde entier qui ont contribué de manière significative à la société, aux progrès technologiques et à la croissance économique. Les finalistes et lauréats des cinq catégories (Industrie, Recherche, Pays non-membres de l’OEB, PME et Œuvre d’une vie) ont été sélectionnés par un jury international indépendant parmi des centaines d’inventeurs et équipes d’inventeur qui lui ont été proposés pour cette nouvelle édition du Prix. Le gagnant du « Prix du public » a quant à lui été désigné par les internautes lors d’un vote en ligne en amont de la cérémonie.
Jérôme Galon a révolutionné le diagnostic du cancer en démontrant comment le système immunitaire d’un patient pouvait avoir une influence sur la lutte contre la maladie. « Quand j’ai commencé à travailler sur le cancer, la recherche se concentrait surtout sur l’étude des cellules cancéreuses », raconte l’inventeur. « En tant qu’immunologiste, il était clair pour moi que le système immunitaire avait un rôle majeur. En évaluant le degré de résistance du système immunitaire du patient atteint d’un cancer, il est possible de déterminer s’il présente un risque de récidive faible ou élevé. Cela permet aux médecins non seulement de mieux diagnostiquer les cancers, mais aussi de prodiguer aux patients les traitements les plus efficaces et d’éviter certains traitements inutiles ».
Après plusieurs années d’intenses recherches, Jérôme Galon a mis au point l’Immunoscore®, un test de diagnostic in-vitro qui mesure la réponse immunitaire des patients atteints de cancer. Il consiste à examiner un petit échantillon de tissu prélevé sur la tumeur primitive d’un patient. Le test analyse le foyer d'origine du cancer en y comptant le nombre de lymphocytes T cytotoxiques, cellules immunitaires qui détruisent les cellules cancéreuses ou infectées par des virus. Plus ces cellules immunitaires sont présentes dans les tumeurs, meilleures sont les chances de survie du patient. Pour réaliser le test, un scanner spécifique réalise des images numériques d’échantillons tumoraux, sur lesquelles un logiciel va compter le nombre de cellules immunitaires. Un algorithme calcule ensuite l'Immunoscore du patient en fonction de la concentration de lymphocytes T. Le test permet aux médecins de mieux évaluer la gravité d’un cancer ainsi que le risque de rechute ou de décès à différents stades de la maladie.
Jérôme Galon a déposé sa première demande de brevet pour l'Immunoscore® en 2005. S'en sont suivies plusieurs autres demandes de brevets portant sur divers aspects de son invention. On retrouve désormais le nom du chercheur français dans 15 brevets européens. Pour commercialiser son invention, Jérôme Galon a co-fondé la société HalioDx à Marseille en 2014, une spin-off dont il préside désormais le Conseil Scientifique. « Transformer la recherche fondamentale en une solution applicable dans la vie réelle est très stimulant », souligne-t-il. Aujourd'hui HalioDx emploie 160 personnes et licencie les brevets de l'Immunoscore® de Jérôme Galon détenus par l'Inserm.
Dès le début, la société a été soutenue par du capital-risque. Les investisseurs ont examiné de près la solidité et la portée des brevets. « Sans les brevets, je n'aurais jamais pu réunir les fonds nécessaires », explique Jérôme Galon.
L’inventeur, immunologiste de formation à l'Institut Pasteur et à l'Institut Curie à Paris, a obtenu son doctorat en immunologie au campus de Jussieu de Paris-VI en 1996. Après avoir travaillé comme chercheur postdoctoral aux NIH (National Institues of Health) des États-Unis, Jérôme Galon est revenu à Paris en 2001 pour diriger un groupe de recherche financé par l'Inserm. Aujourd’hui Directeur de Recherche à l’Inserm, il dirige également le Laboratoire d'Immunologie et Cancérologie Intégratives au Centre de Recherche des Cordeliers.
Des cliniques du monde entier ont aujourd'hui recours à l'Immunoscore® dans le cas de cancer colorectal où la probabilité du test de prédire la survie des patients qui en sont atteints a été établie à 95 %. L'entreprise a également lancé un test spécifique au cancer du poumon et l'inventeur espère que son test pourra être utilisé à l’avenir pour de nombreux autres types de cancers. Grâce à l'invention de Jérôme Galon, les médecins peuvent être plus précis dans la sélection, le dosage et l'adaptation des traitements pour chaque patient.
Patrizia Paterlini-Bréchot, oncologue italienne basée à Paris, était également finaliste du Prix dans la catégorie « Recherche » pour avoir mis au point le test ISET®, première méthode de filtration du sang pour isoler les cellules cancéreuses à un stade précoce. Il permet de repérer très en amont l'apparition d’une tumeur, bien avant qu'elle ne puisse être détectée grâce aux méthodes classiques d'imagerie médicale. Plus tôt ces cellules sont dépistées, plus vite il est possible de traiter le patient avec succès.
La nomination de ces deux inventeurs confirme que la France dispose d’atouts considérables en matière de recherche contre le cancer et que son excellence tient notamment à la qualité de ses chercheurs.
Jérôme Galon : vidéo de présentation (YouTube)
Industrie
Klaus Feichtinger et Manfred Hackl (Autriche) :
Un recyclage du plastique plus efficace
La nouvelle approche de ces inventeurs autrichiens a permis de complètement redéfinir le recyclage du plastique. Ainsi, des déchets plastiques très variés peuvent être transformés en granulés de qualité servant à fabriquer de nouveaux produits. Aujourd'hui, ils ont plus de 6 000 machines en service dans le monde qui produisent 14,5 millions de tonnes de granulés par an.
Pays non membres de l’OEB
Akira Yoshino (Japon) :
La batterie lithium-ion et ses améliorations
Ce scientifique japonais est le père de la batterie lithium-ion (LIB). Ses batteries rechargeables alimentent près de cinq milliards de téléphones et ordinateurs portables, de nombreux autres appareils mobiles ainsi que des véhicules électriques. Depuis des décennies, il voue son travail à l'amélioration des batteries lithium-ion.
Petites et moyennes entreprises (PME)
Rik Breur (Pays-Bas) :
Un revêtement marin antifouling à base de fibres
S'inspirant de la surface piquante des oursins, le revêtement antifouling mis au point par cet inventeur néerlandais constitue une alternative écologique aux peintures toxiques des bateaux et infrastructures maritimes. Les algues, les bernacles et les moules ne peuvent y adhérer, ce qui permet aux bateaux d'économiser jusqu'à 40 % de carburant.
Prix du Public et Œuvre d'une vie
Margarita Salas Falgueras (Espagne) :
Amplifier l'ADN pour analyser le génome
Cette scientifique espagnole, pionnière en génétique moléculaire, a inventé un moyen plus rapide, plus simple et plus fiable de dupliquer des échantillons d'ADN en quantités suffisamment importantes pour procéder à des examens génomiques complets : le recours à l'enzyme polymerase phi29. Son invention est aujourd'hui largement utilisée dans le domaine de l'oncologie, de la médecine légale et de l'archéologie.