Cancer du sein : mieux dépister pour mieux soigner

MyPeBS : mobilisation européenne pour proposer un dépistage personnalisé, plus efficace et plus sûr

- Théragora le 1 octobre 2018/FL N° 14 - Page 0 - crédits iconographique Frantz Lecarpentier/Unicancer

MyPeBS est une vaste étude européenne, à l'initiative d'Unicancer, qui ambitionne de proposer un dépistage personnalisé plus efficace et plus sûr.

Avec  360 000 nouveaux cas diagnostiqués et 92 000 décès chaque année en Europe, le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme. Les campagnes de dépistage actuelles visent toutes les femmes avec un seul critère de sélection : l’âge. Mais elles comportent un certain nombre d’écueils : faux positifs sur les mammographies, risque de sur-diagnostic, voire de sur-traitement ou au contraire, chez certaines femmes, risque de développer un cancer de l’intervalle dépisté trop tard.

Fontaine Neptune à Bologne, détail

 

 

L’étude MyPeBS (My Personal Breast cancer Screening) est la première étude clinique européenne randomisée, menée à l’échelle européenne, qui vise à évaluer les bénéfices d’un dépistage dont la fréquence sera adaptée au risque individuel de cancer du sein de chaque femme. Une étude multicentrique à laquelle participeront 85 000 femmes volontaires de 40 à 70 ans, randomisées dans l’un des deux groupes :
• un groupe de dépistage standard, tel qu’il est proposé dans chaque pays ;
• un groupe de dépistage stratifié en fonction du risque de cancer du sein.

 

Les deux objectifs principaux de MyPeBS son de montrer qu’en comparaison du dépistage standard, le dépistage stratifié est au moins aussi efficace en termes de détection des cancers avancés au diagnostic (stade 2 et plus). Mais aussi à long terme, sauver plus de femmes en réduisant le nombre de cancers du sein diagnostiqués à un stade avancé.

MyPeBS comparera aussi pour les deux stratégies de dépistage les taux de faux positifs, le sur-diagnostic, mais aussi l’impact psychosocial sur les participantes et le ratio coût-efficacité.

Le financement de MyPeBS est  coordonnée en Europe par Unicancer et soutenue par l’Union européenne à hauteur de 12 millions d’euros, dans le cadre du programme européen Horizon 2020 de financement pour la recherche et l’innovation. MyPeBS fédère 7 pays et 26 partenaires européens et américains. 

C'est en tout 85000 femmes réparties sur 5 pays qui vont sur la base du volontariat participer à cette vaste étude :  [France (20 000 femmes volontaires attendues - Italie (30 000 femmes volontaires attendues ) - Israël (15 000 femmes volontaires attendues) - Belgique (10 000 femmes volontaires attendues) - Royaume-Uni (10 000 femmes volontaires attendues)]. Les premier résultats seront disponibles dans 6 ans.
 

Quel dépistage personnalisé dans MyPeBS ?

MyPeBS propose d’évaluer l’intérêt d’un dépistage basé sur le risque individuel d’avoir un cancer du sein dans les 5 ans à venir. Ce risque sera calculé à partir de diverses données personnelles à chaque femme, comme son âge, ses antécédents familiaux de cancer (qui sont très liés à des facteurs génétiques), son « statut » hormonal (exemple : âge des premières règles), sa densité mammaire, mais aussi son « genotype » : analyse des polymorphismes de son ADN par un test salivaire. Ce dépistage personnalisé proposera de réaliser des mammographies à une fréquence adaptée à ce niveau individuel de risque : plus le risque sera élevé, plus la fréquence sera importante.

Ceci devrait permettre de détecter le plus tôt possible un cancer du sein chez les femmes les plus à risque, et de diminuer l’exposition des femmes qui sont le moins à risque, aux effets délétères des mammographies : faux-positifs, sur-diagnostics, sur-traitements, anxiété inutile liée à ces diagnostics et sur-traitements, (rares) cancers radio-induits.

Dans quelques cas, un examen d’Imagerie par résonance magnétique (IRM) (très haut risque) ainsi qu’une échographie complémentaire (densité mammographique élevée) pourront être proposés.
 

Quels sont les objectifs de l’étude MyPeBS ?

L’étude MyPeBS a pour but d’évaluer si un dépistage personnalisé en fonction du risque individuel de cancer du sein est au moins aussi efficace, voire plus, que le dépistage standard pour détecter les cancers du sein avant qu’ils ne soient avancés.

MyPeBS évaluera également si cette stratégie personnalisée de dépistage peut réduire les conséquences potentielles négatives du dépistage standard par mammographie, notamment les biopsies inutiles suite à des « faux-positifs » ou les sur-diagnostics (2) entrainant des sur-traitements. De plus, l’étude comparera l’impact sociopsychologique et socioéconomiquedes deux stratégies de dépistage, en évaluant la satisfaction des femmes, leur anxiété, etc.

Après l’analyse de tous les résultats de l’étude, le projet européen MyPeBS proposera des recommandations générales pour le meilleur dépistage possible du cancer du sein en Europe.

 

Qu’est-ce qu’une étude randomisée ?
MyPeBS est une étude randomisée, ce qui signifie que les femmes qui souhaitent participer seront assignées par hasard (tirage au sort par ordinateur) à l’un des deux programmes de dépistage : soit le dépistage standard (groupe 1), soit le dépistage basé sur le risque (groupe 2). La randomisation permet de constituer des groupes comparables. Ainsi dans MyPeBS, les femmes auront 1 chance sur 2 (50 %) d’être tiréesau sort dans l’un ou l’autre groupe.
• Dans le groupe 1, elles suivront le dépistage standard (en France par exemple, mammographie tous les 2 ans de 50 à 74 ans)
• Dans le groupe 2, elles auront un programme de dépistage personnalisé en fonction de leur risque individuel estimé de développer un cancer du sein dans les 5 ans à venir.

 

 

La parole au Dr Suzette Delaloge, Oncologue à Gustave Roussy, Villejuif, France et présidente du French Breast Cancer Intergroup, Unicancer, France Coordinatrice de MyPeBS

« Toutes les femmes ont un risque de cancer du sein différent. Aujourd’hui, excepté pour les femmes à très haut risque (mutation connue BRCA1/2), les dépistages mis en oeuvre en Europe – qui varient d’un pays à l’autre - ne tiennent pas compte de ces différences. Faut-il changer le dépistage et l’adapter au risque de chacune ? Est-ce plus efficace pour limiter le nombre de cancers détectés à un stade avancé ? 

MyPeBS a pour objectif de répondre à ces questions et d’apporter des solutions concrètes aux problèmes soulevés par le dépistage actuel : part de faux-positifs, risque de sur-diagnostic et de sur-traitements, expositions répétées inutiles à des rayonnements ionisants, cancers de l’intervalle, etc.

Si nous parvenons à prouver la pertinence médicale du dépistage personnalisé, son acceptabilité par les femmes, sa soutenabilité économique, alors MyPeBS permettra d’unifier les pratiques européennes dans une large refonte du dépistage du cancer du sein.

Et nous espérons que cela permettra de sauver plus de femmes.

Aujourd’hui, le succès de cette étude cruciale dépend de l’engagement des professionnels de santé mais surtout des femmes elles-mêmes qui décideront de participer à cette ambitieuse aventure. C’est pourquoi nous comptons sur vous pour relayer l’information. »

 

 

 

Pour participer à l'étude

 

Étape 1 : test d’éligibilité

Les femmes souhaitant participer à l’étude doivent tout d’abord vérifier si remplissent les critères « administratifs » pour entrer dans l’étude : ont-elles l’âge requis et vivent-elles dans une région participante ? – NB : en France, 30 départements participeront.

Le test de pré-éligibilité est en ligne sur le site www.mypebs.eu

Étape 2 : visite « d’inclusion »

Les femmes pré-éligibles contactent alors l’un des médecins investigateurs (radiologues, généralistes, gynécologues) dont la liste est en ligne sur le site web.

Un rendez-vous leur est donné pour une «visite d’inclusion» lors de laquelle elles auront plus d’informations, vérifieront leurs antécédents médicaux avec le médecin et se verront remettre des documents d’information au sujet de l’étude.

Après avoir lu le formulaire d’information et après avoir pu poser toutes les questions à leur médecin, il leur sera proposé de signer un formulaire de consentement pour participer à l’étude.

 

Étape 3 : saisie des données

Toutes les informations liées à l’étude seront saisies par les femmes participantes et les investigateurs dans une plateforme web dédiée à l’étude MyPeBS, via un accès personnel et sécurisé. Les femmes participantes pourront ainsi accéder à leur espace dans lequelelles pourront retrouver leur programme de dépistage, leurs questionnaires, des lettres à imprimer pour leurs différents médecins si besoin ,etc.

Les données cliniques des participantes seront anonymisées comme la  réglementation des essais cliniques le requiert.

 

Étape 4 : répartition dans un groupe

Les participantes seront ensuite randomisées dans l’un des 2 groupes :

• Soit dans le groupe « dépistage standard » : leur calendrier de dépistage, c’est-à-dire le calendrier de leurs mammographies, suivra le programme de dépistage standard en vigueur pour les 4 années de participation à l’étude. Il n’y aura pas d’autre visite dans le cadre de l’étude MyPeBS.

• Soit dans le groupe « dépistage personnalisé basé sur le risque », il leur sera demandé pendant la visite d’inclusion de fournir un échantillon de salive qui sera utilisé pour analyser leur ADN. Cette analyse recherchera un ensemble de variants (polymorphismes génétiques) associés à un sur-risque de cancer du sein. Leur échantillon de salive sera ensuite envoyé et analysé dans un laboratoire d’analyse spécialisé situé en France. Leur niveau de risque, basé notamment sur cette analyse génétique leur sera communiqué après quelques semaines.

 

Étape 5 : seconde visite, UNIQUEMENT pour les femmes du groupe « dépistage personnalisé basé sur le risque »

La 2de visite aura lieu environ 12 semaines après la visite d’inclusion, le temps que l’analyse génétique soit effectuée.

A l’approche de la date de son (ses) visite(s)/examen(s) programmés, elles recevront un rappel par courrier, e-mail ou SMS.

Leur niveau de risque leur sera communiqué et expliqué par leur investigateur, lors de cette seconde visite, en même temps que leur programme de dépistage personnalisé, c’est à dire le calendrier de leurs mammographies (et des autres examens radiologiques si tel est le cas) pour les 4 prochaines années.

 

 

Quelles conséquences potentielles pour les femmes,de participer à l’étude MyPeBS ?

• Les participantes dont le niveau de risque sera associé à des examens moins fréquents qu’avec le calendrier de dépistage standard en vigueur dans leur région auront moins de risques de subir les effets délétères liés au dépistage par mammographie. Afin de réduire le risque de détecter un cancer plus tardivement qu’avec le calendrier de dépistage standard (ce risque est estimé à environ 1 femme pour 1 000), ces femmes seront « suivies » de près : elles recevront régulièrement des recommandations visant à prévenir et à détecter un cancer du sein (ex : auto-palpation, rendez-vous chez leur gynécologue ou médecin généraliste en cas de suspicion), et il leur sera demandé de mettre à jour périodiquement leur données personnelles de manière à réévaluer leur profil de risque si besoin et, le cas échéant, leur calendrier de dépistage.

• Chez les participantes dont le niveau de risque sera associé à des examens plus fréquents, un cancer du sein devrait pouvoir être détecté plus tôt qu’avec le dépistage standard, ce qui permettra d’en réduire la morbidité et la mortalité associées. En revanche, le risque de subir les effets indésirables du dépistage par mammographie sera potentiellement plus élevé. Les mammographies seront faites selon les standards du dépistage organisé, avec un très haut niveau technique et une seconde lecture systématique.

 


Des patientes volontaires témoignent 

« Etant dans une « zone d’âge » dite de surveillance je me suis demandée si l’âge devait être le seul critère sur lequel on devait se baser ? En dehors des femmes identifiées à risque. Cette étude MyPeBS me séduit du fait que ce soit personnalisé. « Plus de standardisation » . Par ailleurs, je suis fière d’apporter ma contribution à cette grande étude de santé publique. »

Mariem • France


 

« Tous les deux ans, je participe au programme de dépistage italien. Et à chaque fois que je suis à la clinique, en attendant ma mammographie, je vois à quel point nous sommes toutes différentes et je me demande si « mettre tout le monde dans le même panier » est vraiment la seule solution. Enfin, quelqu’un veut évaluer sérieusement si la personnalisation pourrait améliorer la prévention. »

Elisabetta • Italie


 

« Cela fait plusieurs années que je me pose des questions à propos du dépistage du cancer du sein. Il y a eu plusieurs articles qui sèment le doute : est-ce que la manière dont nous dépistons aujourd’hui est la meilleure ? Quand j’ai entendu parler de cette étude scientifique, j’ai tout de suite été intéressée, parce que ce n’est qu’avec une étude scientifique solide que la question pourra vraiment être tranchée de manière indiscutable. Je m’engage donc, même si je sais que je n’ai qu’une chance sur deux de bénéficier du dépistage individuel, puisqu’il y aura un tirage au sort, ce qui est la règle pour toute étude scientifique bien menée.Les résultats profiteront à toutes les femmes des générations suivantes, et c’est une motivation suffisante pour moi. »

Karine • Belgique

 


 

 

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