Alors que le procès Spanghero s’ouvre à Paris la semaine prochaine, foodwatch rappelle que les conditions semblent malheureusement réunies pour qu’un tel scandale puisse se reproduire. Si ce procès est un pas contre l’impunité, il doit aussi être l’occasion de briser le cercle infernal qui permet aux scandales alimentaires de s’enchaîner avec un schéma quasi immuable : opacité pour les consommateurs, manque de traçabilité et sous-effectifs criants au sein des organes de contrôle. Six ans après le scandale de la viande de cheval qui a ébranlé l’Europe, foodwatch rappelle l’urgence de mieux protéger les consommateurs et consommatrices. Paris, le 18 janvier 2019. Le scandale de la viande de cheval vendue pour du bœuf a provoqué en 2013 une onde de choc sans précédent. Pour foodwatch, l’ouverture du procès Spanghero doit enfin sanctionner les responsables, certes, mais aussi permettre de questionner les responsabilités politiques et mettre en lumière les manquements d’acteurs jusqu’ici épargnés : les distributeurs qui n’ont jusque-là pas eu à rendre de comptes. Partie du Royaume-Uni pour s’étendre à toute l’Europe, l’affaire a révélé les combines de toute une filière, jusqu’à concerner des marques comme Findus ou Picard et finir dans nos assiettes. Plus de 4,5 millions de plats cuisinés à partir de viande frauduleuse ont été écoulées en Europe, dans plus de 13 pays. L’enquête a mis en lumière l’incroyable trafic de la viande de cheval par le biais de traders hollandais, dont la société est basée à Chypre. La viande sillonnait l’Europe et était ré-étiquetée afin de se faire passer pour ce qu’elle n’était pas. Des tests ADN menés en 2013 dans 27 pays de l’Union européenne avaient montré que la France était le pays le plus touché par la fraude à la viande de cheval avec 13,3% de produits testés positifs (contre 4,6% en moyenne ailleurs en Europe). Le procès qui s’ouvre la semaine prochaine à Paris touche au cœur du système, car il concerne Jacques Poujol et Patrice Monguillon, deux anciens dirigeants de la société Spanghero, entreprise de transformation de viande qui fournissait la filière, et deux traders hollandais, maillons incontournables : Johannes Fasen, patron de la société Draap Trading (qui signifie « cheval » en néerlandais) et Hendricus Windmeijer (ou Hans Windmeijer). Ils comparaîtront pour « tromperie » et « escroquerie en bande organisée », délits punis par de lourdes sanctions. « Ce procès, c’est un signal contre l’impunité et c’est aussi l’occasion de briser le cercle infernal qui permet aux scandales alimentaires de s’enchaîner avec un schéma quasi immuable : opacité pour les consommateurs, manque de traçabilité, sous-effectifs criants au sein des organes de contrôle », alerte Karine Jacquemart, directrice de foodwatch France. Certes, ce scandale a généré quelques mesures : la création d’un réseau européen pour une meilleure collaboration entre Etats membres, le Food Fraud Network, la loi Hamon qui a presque multiplié par dix les amendes en cas de tromperie ou encore la mention obligatoire en France depuis 2017 de l’origine de la viande dans les plats préparés. Pour foodwatch, six ans après l’affaire de la viande de cheval, le constat reste accablant et il est impératif d’aller beaucoup plus loin.
« Qui peut décemment affirmer que la sécurité alimentaire est garantie dans ces conditions et que les fraudes sont arrêtées à temps ? », interpelle Karine Jacquemart, de foodwatch. Le procès Spanghero devra mettre en lumière toutes les responsabilités. foodwatch va continuer d’exiger des autorités un renforcement de la législation, de la traçabilité, des contrôles, des sanctions et, surtout, la transparence des informations pour tout ce qui concerne notre alimentation. Parce que nous avons le droit de savoir. |
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Sources
En Europe : - Création en juillet 2013 d’un réseau européen pour une meilleure collaboration, le Food Fraud Network (il comprend les 28 Etats membres, la Commission, mais aussi la Suisse, la Norvège et l’Islande). En France : - La Loi Hamon sur la consommation votée en 2014 a durci les sanctions en cas de tromperie : les amendes passent de 37 500 euros à 300 000 euros pour les personnes physiques et jusqu’à 10% du chiffre d’affaires pour les personnes morales (entreprises). - L’étiquetage de l’origine des viandes et du lait dans les plats préparés, exception française depuis le 1er janvier 2017, négociée avec l’Europe qui vient d’être reprolongée de deux ans. |