Confrontés à une demande croissante de correction de toutes sortes d’imperfections qui déséquilibrent l’harmonie du visage ou de la silhouette, les généralistes peuvent se former à de multiples techniques. Peut-on proposer un traitement esthétique sans risque et apportant un bénéfice réel et durable ?
Comme le souligne le Dr Jean-Jacques Legrand, président de la Société française de médecine esthétique, le médecin n’est pas tenu à une obligation de résultat, mais il se doit de ne proposer une thérapeutique que dans la mesure où elle a fait l’objet de travaux ayant démontré, sinon sa totale efficacité, du moins une réelle activité.
Si en thérapeutique médicale, une complication exceptionnelle peut être « occultée », il n’en est pas de même lorsqu’on applique un traitement esthétique sur une personne en parfaite santé. Le patient qui consulte pour un problème esthétique qui le préoccupe est généralement en parfaite santé et il serait paradoxal qu’un traitement médical soit susceptible d’engendrer une pathologie. En dehors de l’intérêt de mémoriser “ l’avant et l’après ”, tant pour le médecin que pour le patient, la prise de clichés photographiques s’avère une nécessité médico-légale (resurf laser par exemple).
Les champs d'application de la Médecine Esthétique s'étendent à la Dermatologie Esthétique, à la Phlébologie Esthétique, à l'Endocrinologie, à la Nutrition, à la Cosmétologie et, en collaboration avec les Chirurgiens Plastiques, à la Chirurgie Esthétique.
Pour 800 généralistes, la médecine esthétique représente plus de 50 % de leur activité et pour 200 d’entre eux 100 %. Des milliers d’autres pratiquent régulièrement certains actes techniques. Il faut informer le patient sur les possibilités réelles de succès, sur le temps nécessaire pour obtenir les résultats escomptés, sur les frais occasionnés par le traitements proposés et sur leurs risques éventuels. Ces actes ne coûtent rien à l’assurance maladie car hors de son champ de couverture (se reporter à la nomenclature).
Pour le Dr Gérard Danteny, généraliste à Aubervilliers (Seine-St-Denis), il s’agit d’une progression logique dans l’exercice. “ Des techniques à visée esthétique qui relèvent incontestablement du domaine du soin médical ont fait la preuve de leur efficacité et de leur fiabilité. Il est donc tout à fait normal que se soit développée, chez un certain nombre de praticiens, une volonté d’apporter une réponse à une demande croissante de la part de leurs patients. Après une carrière dans l’industrie pharmaceutique, je me suis installé comme généraliste en 1994. Quatre ans plus tard, j’ai éprouvé le besoin d’élargir mes connaissances et d’aller à la découverte de nouvelles techniques. La médecine esthétique me semblait une suite logique : en effet, à travers mon expérience, j’ai pu constater que l’esthétique représentait une préoccupation majeure pour mes patients. »
La Médecine Esthétique existe dans les faits. En France, le début de son histoire se situe en 1973, date de la création de la Société française de médecine esthétique (SFME). Elle est soutenue par une forte croissance de la demande du public et se caractérise par une offre de soins et de conseils de plus en plus performante, complexe et spécialisée. Mais 27 ans après sa création, elle n'existe toujours pas dans les textes. Son fonctionnement n'est régulé qu'imparfaitement par des initiatives privées.
Ainsi depuis 1995, le Syndicat National des Médecins Esthétiques (SNME) et le Collège National de Médecine Esthétique (CNME) qui en est issu ont mis en place un enseignement théorique et pratique sur 2 ans, institué sur le modèle d’une capacité universitaire, qui débouche sur une attestation de fin d’études. Les cours sont organisés en 8 séminaires de trois jours par an. Il est par ailleurs surprenant de constater que la médecine esthétique ne fait l’objet, dans la mise en œuvre de son exercice, d’aucune réglementation en dehors du principe éthique et déontologique qui impose à tout médecin d’apporter son concours et ses soins aux patients dans la limite de ses compétences et en se fondant sur les données acquises de la science.
La reconnaissance officielle de la médecine esthétique, l’organisation de la transmission des connaissances, l’encadrement de l’exercice professionnel apparaissent comme une nécessité de santé publique et de sécurité pour les patients.
Certes, la gamme des produits mis à la disposition du médecin esthétique ne cessent de s’élargir ; les techniques progressent, s’affinent. Mais au-delà des outils et de leur maniement, seule une approche globale incluant une véritable prévention du vieillissement (nutrition, micronutrition et hormonothérapie) s’avère judicieuse.
1. Rajeunissement facial
Les peelings permettent de traiter le vieillissement du visage avant ou en complément de la chirurgie (lifting, blépharoplastie…). Ils sont indiqués lorsque la peau est flétrie, manque d’éclat, présente de nombreuses ridules ou un aspect irrégulier. “ Il s’agit d’un outil merveilleux pour le médecin s’intéressant au rajeunissement facial affirme le Dr Jean-Luc Vigneron, dermatologue à Saint Paul de Vence. En effet, la palette dont nous disposons aujourd’hui se décline en 3 niveaux d’action - superficiel, moyen et profond - et répond à la quasi-totalité des demandes ”.
La tendance actuelle se caractérise par une utilisation très large des peelings superficiels, utilisant notamment l’acide glycolique ou la vitamine C à forte concentration. Dans le domaine des peelings moyens, l’apparition de produits innovants comme le Week-end Peel, associant poudre de corail et facteurs kératolytiques, a ouvert un marché dominé jusqu’à présent par l’acide trichloracétique (TCA). Enfin, on assiste à un renouveau des peelings profonds grâce à la mise au point d’une nouvelle formule au phénol, l’Exopeelâ. “ Son secret réside dans son pH qui permet de limiter et surtout de contrôler la pénétration. La toxicité et les risques cicatriciels sont dès lors minimes et la reproductibilité excellente poursuit le Dr Vigneron. Et les résultats spectaculaires puisque le gain est toujours de 10 à 15 ans ! ”. L’apprentissage rigoureux des techniques (mode de préparation de la peau dans les semaines précédant le peeling, technique de nettoyage, application du produit, soins post-peeling) est toutefois indispensable pour appréhender les limites de chacun des produits et en tirer le maximum d’efficacité.
Autre arme de taille qui vient compléter la gamme des peelings, le resurfacing laser ou laser-abrasion. Cette fois, l’abrasion cutanée ne dépend plus - en théorie du moins - de l’opérateur, mais de paramètres physiques précis (énergie, durée de l’impulsion, surface du spot). Un véritable défi toutefois, car un bon resurfaçage doit se situer à la limite du derme réticulaire superficiel, tout en respectant le derme profond car une atteinte de ce dernier entraînerait la destruction des annexes, des fibroblastes et du collagène, avec pour conséquence une cicatrisation dystrophique et une dépigmentation définitive. Comme le confirme le Dr Mario Trelles (Tarragona, Espagne), les évolutions technologiques sont constantes dans ce domaine : “ le laser CO2 a été le premier utilisé ; inconvénient majeur, il pouvait entraîner, par dissipation de la chaleur résiduelle, une brûlure au-delà de la surface et de la profondeur voulue. Il a tout d’abord fait place au laser Erbium Yag, plus précis, mais dont les résultats s’estompaient avec le temps ; nous disposons depuis peu d’un laser dont l’efficacité et la sécurité d’emploi sont remarquables, le Derma-K ”.
Le resurfacing laser est habituellement utilisé sur la totalité du visage (“ full face ”). Il n’a pas d’indication dans les rides isolées.
2. Rides
Le traitement médical des rides par photovieillissement fait appel à des méthodes de comblement : produits non résorbables - qui imposent une technique parfaitement maîtrisée - ou produits résorbables (collagène, acide hyaluronique…). Il est également possible de combiner ces deux techniques, autrement dit de créer un soubassement à l’aide de produits persistants, puis de parfaire le résultat en surface par des injections de produits résorbables. Enfin, le lipofilling utilise le propre tissu graisseux du patient comme produit de comblement pour les rides et sillons du visage.
Quant aux rides d’expression, dues en grande partie à la contraction des muscles sous-jacents, elles relèvent d’une thérapeutique spécifique, les injections de toxine botulique, qui n’ont hélas pas encore reçu d’AMM en France dans cette indication.
3. Calvitie
Deux techniques permettent aujourd’hui d’obtenir d’excellents résultats dans la correction de la calvitie : la microgreffe (cheveu par cheveu) et la minigreffe (3 à 5 cheveux). Il s’agit d’interventions légères, fiables et très minutieuses, réalisées dans des conditions d’asepsie rigoureuses.
La greffe de cheveux comprend toujours deux temps distincts : le prélèvement des greffons d’une part, la création de sites receveurs et l’insertion des greffons de l’autre.
La technique habituelle consiste à prélever sous anesthésie locale une ou plusieurs bandelettes étroites de cuir chevelu occipital - zone programmée génétiquement pour ne jamais tomber -, puis à les découper en mini- ou microgreffons. De petites incisions dans lesquels viendront s’adapter les greffons sont ensuite pratiquées à l’aiguille, au bistouri ou au laser.
“ L’angle d’émergence des cheveux greffés est l’un des détails les plus importants pour la réussite esthétique souligne le Dr Jean Arouete, dermatologue à Paris. Ce n’est pas l’angle d’implantation du greffon dans son site qui détermine l’angle d’émergence du cheveu greffé, mais l’angle d’incision ”. Pour faciliter l’introduction du greffon, on peut utiliser - comme le montre la photo ci-dessus - un dilatateur, sorte de clou qui, enfoncé dans la fente, va maintenir écartées les berges de l’incision.
La cicatrisation est simple : des croûtes vont se former, persister 3 à 4 semaines, puis tomber. Elles entraînent les tiges capillaires. La repousse aura lieu 2 à 3 mois après la greffe.
4. Varices et varicosités
Une nouvelle technique, la scléro-émulsion, dispose, semble-t-il, de toutes les potentialités pour apporter une réponse aux reproches émis à l’encontre de la sclérothérapie classique (efficacité limitée, nombre de séances élevé…).
Son principe, énoncé dès les années 50 puis tombé dans l’oubli, est simple : les sclérosants comme le Trombovarâ ou le polidocanol appartiennent à la famille chimique des savons. Or l’introduction d’un gaz dans un savon permet d’obtenir une mousse, état physique qui possède la propriété de ne pas se mélanger aux liquides. “ La mousse va donc repousser la colonne sanguine. Le sclérosant ne se dilue plus dans le sang ce qui permet d’optimiser l’action du produit et très souvent de diminuer les concentrations de sclérosants injectés. L’action ne tient plus compte de la dilution liée à la rencontre avec le sang, mais seulement de la concentration nécessaire de sclérosant pour altérer la double couche phospholipidique des parois des cellules endothéliales de la veine ” explique le Dr Jean-Patrick Bénigni (Ecole européenne de phlébologie, Paris)
Une des méthodes les plus utilisées consiste à mélanger le sclérosant et l’air dans une seringue en plastique en tirant et relâchant le piston plusieurs fois de suite. La scléromousse obtenue est très compacte et stable dans le temps. Cette méthode est sûre au plan bactériologique. En outre, la quantité d’air introduite dans le sang est au maximum de 2 ml ; compte tenu des capacités de saturation en oxygène du sang veineux, le risque d’embolie gazeuse reste extrêmement faible.
5. Lipoaspiration
A la lipoaspiration traditionnelle (profonde) est venue s’adjoindre une technique complémentaire, la lipoplastie superficielle qui constitue une évolution dans la mesure où elle apporte une amélioration de l’aspect cutané.
Après une anesthésie locale, on pratique une incision de quelques millimètres au niveau d’un sillon naturel, et introduit une canule de 3 a 5 mm de diamètre. Il procède alors à l’aspiration des tissus graisseux en excès.
Des photos sont prises afin de déterminer les zones à traiter. Un traitement préparatoire peut être prescrit . Apres l’intervention, le port d’un panty de contention est impératif pendant 45 jours afin de permettre à la peau de bien se rétracter/ gaine abdominale si abdo.
Le résultat définitif n’apparaît qu’après 3 à 6 mois.
Une aspiration régulière et homogène évite les effets de vagues ou de tôle ondulée : grâce aux canules plus petites et à la technique des tunnels croises. L'anesthésie locale permet des suites plus simples.
C’est une méthode efficace aux résultats durables. Toutefois si les causes persistent (troubles hormonaux, $, elles auront tendance à reproduire les mêmes effets.
6. Cellulite
La cellulite, un terme quasiment aussi disgrâcieux que ce qu’il désigne ! Une affection ô combien fréquente chez la femme, si mince soit-elle… Plus les adipocytes s’hypertrophient, plus les cloisons conjonctivales qui les contiennent se déforment et tirent sur les points d’ancrage, entraînant un véritable capitonnage de la surface cutanée. La compression des vaisseaux sanguins et lymphatiques environnants altère le métabolisme cellulaire et le processus s’auto-entretient… Tout comme les régimes amincissants, le sport ne s’attaque pas à la cellulite. Alors que proposer à ces femmes préoccupées par cette nuée de capitons disgrâcieux ?
De multiples techniques ont fait la preuve de leur activité - qui reste toutefois souvent partielle et/ou temporaire. Nous n’en décrirons que deux : la mésothérapie et l’endermologie.
La mésothérapie peut être réalisée manuellement ou à l’aide d’injecteurs électroniques qui rendent l’application plus aisée (voir photo). Les médicaments injectés sont de 3 types : lipolytiques, qui réduisent le volume des adipocytes ; vasculotropes qui luttent contre l’altération de la microcirculation ; eutrophiques considérés comme des régulateurs du métabolisme. C’est l’un des traitements médicaux de la cellulite le plus fiable lorsque la prescription est adaptée au cas par cas et la technique d’exécution précise.
L’endermologie utilise un appareil, le cellu M6â, comportant deux rouleaux motorisés couplés à une aspiration. Appliqué sur la peau, il entraîne la formation d’une “ vague ” qui sera enroulée par le 1er rouleau, déroulée par le second, puis déplacée par la tête de traitement, en avant, en arrière, latéralement ou en diagonale selon les objectifs thérapeutiques recherchés. L’aspiration, constante ou rythmée, complète l’effet mécanique par une action perpendiculaire ou, si besoin, tangentielle. Le praticien choisit les manœuvres en fonction du contexte, de la sensibilité des tissus mais aussi de l’âge et de la morphologie de la patiente. Plusieurs milliers de femmes ont déjà bénéficié de ce traitement efficace et indolore.