La plupart des personnes très âgées souffrent de polypathologie. Avec à la clé, une consommation accrue de médicaments. Or le corollaire de cette augmentation, avec l'âge, du nombre de médicaments est une hausse du risque de chute. La raison? "Les interactions médicamenteuses accroissent les effets secondaires indésirables", explique cette pharmacienne brétilienne (Ille-et-Vilaine) spécialisée en PDA (préparation des doses administrées) et qui dispense les traitements de quelque cinq-cents pensionnaires d'Ehpad (établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes).
Une prise inappropriée des médicaments (oubli, mauvaise observance de la prescription) peut également augmenter le risque de chute en entraînant une détérioration de l'état de santé. L'arrêt brusque de la prise de certains médicaments peut aussi provoquer des réactions physiologiques qui pourraient accroître temporairement le risque de chute.
Il convient donc d'être particulièrement vigilant, d'autant que les troubles de l’équilibre liées à la polymédication sont fréquents chez les personnes âgées. Une étude française, dont dont la Revue Prescrire se faisait l'écho en novembre 2016, rappelle que certains médicaments largement prescrits exposent à des risques de chute.
Le Centre régional de pharmacovigilance de Strasbourg a ainsi analysé les dossiers de patients hospitalisés ayant été victimes d’une chute. Au total, 84 chutes de patients âgés en moyenne de 84 ans ont été passées en revue. Les accidents -le plus souvent des fractures - ont entraîné des complications chez environ la moitié d’entre eux. Par ailleurs, près de 40 % ont gardé des séquelles.
En analysant les dossiers, les auteurs ont observé que tous les sujets prenaient en moyenne six médicaments par jour, dont deux les exposant à des risques de chute; tels que des antihypertenseurs (chez environ la moitié des patients), des benzodiazépines, des hypnotiques, des antiépileptiques.
Parmi tous les médicaments existants, certaines catégories sont associées de façon significative aux chutes: ce sont les psychotropes, les médicaments cardio-vasculaires, les anticonvulsivants, les hypoglycémiants et tous les médicaments qui causent de l'hypotension orthostatique. Ces médicaments peuvent provoquer, entre autres : la sédation (diminution de la vigilance); des troubles de la posture et de l'équilibre; de l'hypotension orthostatique (faiblesse lorsque vous vous levez).
Les psychotropes sont associés de façon significative aux chutes chez les personnes âgées puisqu'ils perturbent le temps de réaction à une perte d'équilibre. Une utilisation continue de ces médicaments affecte également la perception de la position du corps dans l'espace.
Parmi les psychotropes, on trouve les neuroleptiques, les antidépresseurs, les antipsychotiques et les sédatifs-hypnotiques-anxiolytiques. La prise de ces médicaments accroît de deux à trois fois le risque de chute et de deux fois le risque de fracture de la hanche.
La famille des sédatifs-hypnotiques-anxiolytiques, en particulier les benzodiazépines, utilisés pour le traitement de l'anxiété ou de l'insomnie, figure dans la liste des médicaments les plus souvent prescrits aux personnes âgées. Les antipsychotiques, servent à diminuer les symptômes de la psychose comme l'anxiété, l'agitation aiguë, les hallucinations, la confusion.
Chez les personnes âgées, ces médicaments sont surtout utilisés en institutions de soins de longue durée pour calmer l'agitation des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et autres sortes de démence, lorsque les approches non médicamenteuses sont insuffisantes. La réduction des tranquillisants et des somnifères, plus particulièrement, mène à une diminution des risques de tomber. Une étude a démontré une réduction des risques de chute de 66 % chez les aînés ayant cessé la prise de certains médicaments et commencé un programme d’exercices.
La relaxation, l'exercice et des modifications de votre environnement peuvent remplacer les calmants. Dans certains cas, il est également possible de réduire progressivement la consommation des anxiolytiques et des somnifères et même parfois de les les abandonner complètement.
Bien entendu, ceci doit s’échelonner sur plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Dans cette perspective, votre médecin et votre pharmacien jouent un rôle très important pour faciliter la prise de vos médicaments. N'hésitez pas à leur poser des questions sur : la posologie, le mode d'administration adéquat de chacun de vos médicaments ; sans oublier l’horaire de prise des médicaments, qui doit être adapté à votre mode de vie.