BEH 3-4 - du 5 février 2019 - Suicide et tentatives de suicide : données épidémiologiques récentes


Ce numéro du BEH contient un éditorial, cinq articles et deux focus :

 

1.Editorial

Prévention du suicide : l’évaluation est indispensable.

Pierre Thomas, Professeur de psychiatrie, Faculté de médecine, Université de Lille, France

 

2.Baromètre de Santé publique France 2017 : tentatives de suicide et pensées suicidaires chez les 18-75 ans.

Christophe Léon/Santé publique France et coll.

 

La France présente un des taux de suicide les plus élevés d’Europe. Ce constat a amené les pouvoirs publics à réinscrire la prévention du suicide dans une stratégie globale de promotion de la santé mentale et de prévention des troubles psychiques, et à fixer des objectifs quantifiés de réduction du nombre de suicide et de tentatives de suicide.

 

L’objectif de ce travail est de présenter une actualisation de la prévalence des comportements suicidaires en France métropolitaine en 2017, d’identifier les populations concernées et d’observer les évolutions depuis 2000. 

 

En 2017, 4,7% des 18-75 ans déclaraient avoir pensé à se suicider au cours des 12 derniers mois, 7,2% avaient tenté de se suicider au cours de leur vie et 0,39% au cours de l’année. Le suivi des indicateurs dans le temps ne permet pas d’appréhender une évolution claire des conduites suicidaires depuis les années 2000. Le fait d’être une femme, les situations financières difficiles, le fait d’être célibataire, divorcé ou veuf, l’inactivité professionnelle ainsi que les évènements traumatisants sont associés aux comportements suicidaires. Le facteur le plus associé aux pensées suicidaires est d’avoir vécu un épisode dépressif caractérisé au cours de l’année (ORa=8,3 pour les hommes et 6,6 pour les femmes).

 

Nos résultats confirment l’intérêt d’engager une politique de prévention du suicide ciblée sur les personnes à haut risque et d’intervenir en amont de la crise suicidaire, dans une logique de repérage et de prise en charge précoce des situations de souffrance psychique. 
Ils plaident également pour une prise en charge multidisciplinaire et intersectorielle (sanitaire, sociale, médicosociale), en particulier à destination des populations vulnérables.

 

3.Les hospitalisations pour tentative de suicide dans les établissements de soins de courte durée : évolution entre 2008 et 2017.

Christine Chan-Chee / Santé publique France

 

L’objectif de l’étude est de décrire les caractéristiques des hospitalisations pour tentative de suicide (TS) dans les établissements de soins de courte durée en France et de présenter leur évolution entre 2008 et 2017. Le nombre d’hospitalisations pour TS a diminué, passant de plus de 100 000 par an en 2008 à un peu moins de 89 000 en 2017. Les taux d’hospitalisation pour TS étaient respectivement de 17,4 et 15,1 pour 10 000 habitants en 2008 et 2017. La diminution était plus marquée chez les femmes (21,7 en 2008 et 18,0 en 2017, p<0,0001) que chez les hommes (13,0 en 2008 et 12,2 en 2017). La réadmission pour TS est restée stable : quelle que soit l’année étudiée, 89,5% des patients ont eu un seul séjour pour TS et 10,5% ont eu au moins un nouveau séjour au cours de la même année civile. Les jeunes filles âgées de 15 à 19 ans avaient systématiquement les taux les plus élevés, en moyenne 41 pour 10 000. Entre 2008 et 2017, une baisse des taux par âge était observée chez les femmes de 20 à 49 ans, tandis que chez les hommes au-delà de 50 ans, les taux étaient plus élevés en 2017 qu’en 2008. En Bretagne, Normandie et Hauts-de-France, les taux étaient supérieurs aux taux nationaux chez les hommes et chez les femmes en 2008 et en 2017. Quelle que soit l’année, les intoxications médicamenteuses volontaires, en particulier aux psychotropes, représentaient le mode le plus fréquent des TS. Une pathologie psychiatrique était notée dans 61% des séjours pour TS (59% chez les femmes et 64% chez les hommes). 


Les pathologies les plus fréquentes étaient la dépression, les troubles mentaux et du comportement liés à l’alcool, ainsi que les troubles anxieux. Bien qu’une diminution des hospitalisations pour TS ait été observée au cours des dix dernières années, des actions de prévention et de prise en charge doivent se poursuivre, en ciblant plus particulièrement certains groupes de population tels que les adolescentes, les hommes de plus de 50 ans et les personnes ayant fait une tentative de suicide.

 

4.Causes associées aux suicides dans les certificats de décès. Analyse des certificats médicaux de décès, France, 2000-2014.

Catherine Ha /Santé publique France et coll.

 

L’objectif de l’étude était de décrire la distribution des pathologies mentales et non mentales associées au suicide à partir des certificats médicaux de décès. Sur la période d’étude, 156 910 décès par suicide chez les individus âgés d’au moins 10 ans ont été enregistrés en France, dont 74% d’hommes.


Ces décès représentent 1,9% du total des décès et 10 461 cas en moyenne par an. Selon ces certificats de décès, 40% des suicides étaient associés à la présence de troubles mentaux, plus souvent chez les femmes que chez les hommes (48% vs 36%). Il s’agissait en grande majorité de troubles dépressifs (38% chez les femmes et 28% chez les hommes). Ceux-ci étaient 41 fois plus fréquemment associés aux suicides qu’aux autres décès. Les suicides des personnes âgées de moins de 25 ans représentaient une part modérée du total des suicides (5,5%), mais étaient à l’origine d’un nombre élevé d’années de vie perdues. Des associations particulièrement fortes ont été observées avec les troubles de l’humeur et les troubles anxieux dans cette classe d’âge. Pour 16% des suicides, le certificat de décès indiquait l’existence d’au moins une pathologie non mentale ayant contribué au décès : les maladies les plus souvent associées étaient celles de l’appareil circulatoire (5% des CD suicide), les maladies du système nerveux (4%) et les tumeurs invasives (3%), sans que l’étude ait été en mesure d’identifier des pathologies non mentales liées aux suicides. Malgré les limites des certificats médicaux de décès à rendre compte des comorbidités, ce travail a permis d’explorer l’information transmise par les médecins certificateurs sur 15 années. Il sera intéressant de  poursuivre ce travail et de l’approfondir avec les données des bases médico-administratives du système national des données de santé (SNDS), qui permettront d’identifier les éventuelles pathologies prises en charge en amont du décès, palliant ainsi les biais de certification médicale des états morbides ayant pu contribuer au suicide.

 

5.Focus

Étude de faisabilité de la mise en place d’un système de surveillance des suicides basé sur les données des instituts médico-légaux. Virginie Gigonzac/ Santé publique France et coll.

 

6.Pensées suicidaires dans la population active occupée en France en 2017.

Pauline Delézire /Santé publique France et coll.

 

Objectifs – Décrire, chez les actifs occupés en France métropolitaine, le taux de prévalence des pensées suicidaires ainsi que les raisons attribuées à ces pensées, et étudier les associations entre l’exposition à certains facteurs professionnels et les pensées suicidaires. Le taux de prévalence des pensées suicidaires parmi les actifs occupés était de 3,8%. Les femmes présentaient un taux plus élevé que les hommes (4,5% vs 3,1%). Les différences de taux de prévalence des pensées suicidaires selon les secteurs d’activité étaient statistiquement significatives. Les secteurs les plus touchés étaient ceux de l’hébergement et restauration, des arts et spectacles ainsi que de l’enseignement. Plus d’un tiers des personnes présentant des pensées suicidaires les attribuaient à des raisons professionnelles. Quel que soit le sexe, les facteurs professionnels étudiés étaient significativement associés aux pensées suicidaires.  Les pensées suicidaires étant associées à la mortalité par suicide, il est important de prévenir leur survenue. Le milieu du travail peut représenter un environnement propice pour développer des actions de promotion et de prévention en santé mentale. Les résultats de cette étude doivent permettre d’orienter ces actions, notamment dans les secteurs d’activité les plus impactés.

 

7.Tentatives de suicide, pensées suicidaires et usages de substances psychoactives chez les adolescents français de 17 ans. Premiers  résultats de l’enquête Escapad 2017 et évolutions depuis 2011.

Eric Janssen / Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT), La Plaine Saint-Denis, France

 

L’enquête Escapad (Enquête sur la santé et les consommations lors de l’appel de préparation à la défense) est réalisée régulièrement depuis 2000 par l’Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT). Les résultats permettent d’offrir un point précis sur les comportements suicidaires et les principaux facteurs associés en 2017, et d’en suivre les évolutions au cours des dix dernières années. En 2017, près de 3% des adolescents de 17 ans déclaraient avoir fait au cours de leur vie une tentative de suicide ayant nécessité une hospitalisation, et plus d’un jeune sur dix déclarait avoir pensé au moins une fois au suicide au cours des 12 mois précédant l’enquête. La comparaison avec les éditions précédentes de l’enquête (2011 et 2014) révèle une augmentation significative des tentatives de suicide et pensées suicidaires déclarées chez les filles entre 2011 et 2017. La variable la plus fortement associée à la déclaration de pensées suicidaires et de tentatives de suicide est le fait de présenter un risque élevé de dépression. Après contrôle sur le sexe, la situation scolaire, la structure familiale, le risque de dépression et la catégorie socioprofessionnelle des parents, les résultats soulignent un lien fort entre tentative de suicide et usages de substances psychoactives, en particulier l’usage de substances illicites autres que le cannabis chez les garçons et l’usage quotidien de tabac chez les filles. Nos données suggèrent que les usages de substances psychoactives pourraient être utilisés comme des indicateurs potentiels pour le repérage d’un risque accru de conduites suicidaires. Ils confirment également l’importance d’une prise en charge précoce des troubles dépressifs chez les adolescents afin d’en réduire l’impact, en particulier sur les passages à l’acte suicidaire.

 

8.Focus

Activité des associations de prévention et d’aide à distance en santé dans le domaine de la prévention du suicide.

Christine Chan-Chee / Santé publique France et coll.

Les entretiens de Théragora
Les robots s'imposent dans le bloc opératoire
Les robots assistants chirurgiens sont désormais très présents dans les salles d'opération des hôpitaux. Associés à l'intelligences artificielle et à la réalité virtuelle, ils ouvrent la voie à la chirurgie cognitive de quatrième génération.
Archives vidéos Carnet Le Kiosque Théragora Mots de la semaine Derniers articles en ligne
Contactez-nous

Théragora est le premier site d'information sur la santé au sens large, qui donne la parole à tout ceux qui sont concernés par l'environnement, la prévention, le soin et l'accompagnement des personnes âgées et autres patients chroniques.

contact@theragora.fr

www.theragora.fr

Suivez-nous et abonnez-vous sur nos 5 pages Facebook

Facebook Théragora
Facebook Théragora Prévenir
Facebook Théragora Soigner
Facebook Théragora Acteurs de ma santé
Facebook Théragora Soutenir

Linkedin Théragora