Le gouvernement ira-t-il jusqu'à modifier l’un des principes essentiels du système de protection sociale ; une sécurité sociale pour tous, un remboursement identique pour tous les assurés quelle que soit leur situation sociale, imaginé par « les pères fondateurs» de la sécurité sociale en 1945 ? C'est en tout cas l'une des pistes que paraissent étudier les experts de Matignon et de Bercy pour tenter d'économiser quelques milliards pour atteindre leur objectif d'économiser quarante milliards dans le budget de l'Etat en 2026.
Quatre grands principes avaient été définis par ces "pères fondateurs": l’universalité, l’unité, l’uniformité et la gestion par les représentants des assurés. Certes, certains de ces principes ont depuis été largement oubliés, s’agissant notamment de la gestion du système puisque le pouvoir exécutif intervient largement et fréquemment, ne serait-ce que par les lois annuelles de financement de la sécurité sociale. Et que le MEDEF a quitté depuis longtemps les instances paritaires syndicats de salariés - patronat.
Mais ce principe n’a jamais fait réellement débat : remboursement de soins pour tous, quel que soit le niveau social de l’assuré et son niveau de revenus. L’universalité n’a jamais eté formellement remise en cause Principe fondamental pour ceux qui ont porté les ordonnances de 45. Mais les temps ont évolué. Rien n’est immuable.
Il est vrai que si certains syndicats ont abordé parfois ce problème, ils ne sont jamais allés très loin dans les discussions, ne voulant à l’évidence pas bouleverser la réforme historique de 1945. Le gouvernement sautera- t- il le pas ? La Cour des comptes dans un récent document lui tend une belle perche, en évoquant une telle réforme qui permettrait, comme en Allemagne d’ailleurs, de moduler les remboursements en fonction des revenus.
Mais rien ne sera simple : à quel niveau de revenus, ces remboursements ne seraient plus automatiques ou seraient diminués ? Y aurait-il divers paliers ? SMIC ? plafond de 4000 euros, au-dessus de 4000 euros ? Plus de 10 000 euros ? Au-dessus ? On le voit rien n’est facile dans la mise en place d’une telle réforme…Prendrait on, en compte le revenu familial ou le revenu individuel, le nombre d’enfants jouerait-il dans la définition du montant des remboursements ? Autre interrogation, et non des moindres, cette réforme établirait-t-elle des niveaux différents de remboursements en fonction des revenus salariaux ou patrimoniaux ? On salive un peu en imaginant les débats de nos députés. Car il faudra bien une loi pour établir un nouveau système.
Autre idée lancée par le Cour des Comptes, et qui tente fortement le ministre de l'économie semble-t-il, moduler les remboursements selon l’efficacité des traitements ou des médicaments. Pour les médicaments, c’est déjà chose faite puisqu’une instance est chargée d’étudier l’efficacité d’un nouveau médicament et de permettre à la commission économique des produits de santé de fixer un prix et un taux de remboursement en fonction de ces critères d’efficacité.. Pour les traitements, l'affaire s’annonce plus ardue…
Mais les mesures d’économies touchant la sécurité sociale et l’assurance maladie ne s’arrêteraient pas là. Ainsi le MEDEF, rejoignant ainsi plusieurs membres du gouvernement, demande (exige ?) que des mesures strictes soient prises pour baisser le montant des remboursements de certains médicaments voire de certaines affections. « On ne peut plus tout rembourser n’importe quoi et à n’importe qui » s’emportait il y a quelques jours un dirigeant du MEDEF ; un raisonnement que l’on retrouve peu ou prou dans le dernier rapport de la Cour des Comptes qui plaide pour « un meilleur partage de l'effort de financement du système de santé entre tous ses acteurs , afin d'alléger le poids porté par l'assurance-maladie obligatoire », et de proposer que les complémentaires santé assument « 1 à 1,5 milliard d'euros » de dépenses aujourd’hui à la charge de l’assurance maladie obligatoire. Une perspective évidemment jugée « démentielle » par le patron des assurances complémentaires.
Le débat n’est pas nouveau mais pourrait enflammer les prochains mois.