La déficience auditive n’est pas un problème anodin. Loin s’en faut. Et en particulier dans le cadre professionnel, puisque 79 % des Français déclarent rencontrer des difficultés à suivre des conversations au travail à cause du bruit (Source enquête Ifop-JNA 2016). Alors que traditionnellement la gêne sonore est imputée aux secteurs dits bruyants du BTP et des industries de la métallurgie, près de huit actifs sur dix travaillant dans le secteur tertiaire se disent eux aussi impactés (Source enquête Ifop-JNA 2016).
Et cet impact n’est pas à prendre à la légère. Selon sept Français sur dix, le bruit génère en effet un état de fatigue (Source enquête Ifop-JNA 2016). Quelque 90% des Français déclarent même que le Bruit est un enjeu de santé publique. La gestion du Bruit et de ses impacts auditifs et extra-auditifs s’annoncent donc comme un facteur clé de succès des démarches de bien être dans les entreprises.
Dans le cadre de la « Semaine de la santé auditive au travail », organisée par l’association JNA à l’occasion de la Semaine Européenne de la Santé et de la Sécurité au travail diverses pistes ont été évoquées pour soutenir les dirigeants, les médecins du travail et tous les acteurs de la santé en entreprise dans leurs démarches de bien-être et de réduction du bruit.
Une démarche d’autant mieux venue que la les impacts du bruit sur la santé auditive seraient méconnus et sous-estimés. Le bruit agirait ainsi insidieusement comme un « agent toxique » sur la santé des salariés et celle de l’entreprise. Sans que ceux-ci soient pour autant conscient. Seul un Français sur deux aurait réalisé un bilan complet de son audition à ce jour (Source : différentes études Ipsos –JNA). Conséquence : la sinistralité de la surdité professionnelle n’est pas totalement connue.
Pour autant, selon le ministère de la Santé, la surdité professionnelle représenterait un coût de 100 000 euros par salarié touché. Une estimation du coût public qui ne prend pas en compte les coûts générés par l’absence pour maladie professionnelle au sein de l’entreprise et les dysfonctionnements associés.
Et que dire de l’effet le moins connu : la fatigue auditive. Elle correspond à un déficit temporaire de l’audition qui va se caractériser par la sensibilité limitée dans le temps. Une exposition sonore continue au-delà des seuils règlementaires de 80 dB pendant huit heures peut générer une fatigue auditive qui, au fur et à mesure de son installation, dans le cas où l’oreille reste exposée même en dehors du temps de travail, va engendrer une usure prématurée des cellules sensorielles de l’oreille.
Mais les effets du Bruit ne se limitent pas à l’appareil auditif, ni aux voies nerveuses et aux aires cérébrales spécifiques de l’audition. Du fait des interconnexions de toutes les voies nerveuses entre elles, les messages nerveux d’origine acoustique atteignent, de façon secondaire, d’autres centres nerveux et provoquent ainsi des réactions marquées au niveau d’autres fonctions biologiques ou d’autres systèmes physiologiques.
En prenant en compte les effets extra-auditifs, il est alors possible d’agir sur les impacts connexes et de réduire les sources de risques cardio-vasculaires, de risques psycho-sociaux, de perte de vigilance source d’accidents du travail et de bien d’autres. Autant d’impacts interconnectés qui devraient être mieux considérés.
D’autant que l’omniprésence du bruit ainsi que les modes de consommation « du bruit » en dehors du temps de travail impactent l’état de santé des Français. Sifflements, bourdonnements dans les oreilles (acouphènes), les troubles de l’audition sont de plus en plus fréquents.
Quant aux traumatismes sonores aigus, ils s’accompagnent de pertes prématurées de l’audition avec, à la clé, une presbyacousie (phénomène d’usure naturelle des cellules sensorielles de l’oreille avec l’âge) de plus en plus précoce. L’état de santé auditif de la population active est donc déjà entaché de ces évolutions négatives. Et il devrait s’accentuer avec le vieillissement de la population au travail. Le phénomène de presbyacousie deviendrait un sujet incontournable des politiques du bien vieillir au sein des entreprises.
D’où la nécessité d’intégrer la dimension « santé auditive » afin d’agir en amont des risques de surdité professionnelle. Il s’agit dès lors non plus de lutter contre les émissions sonores toxiques mais de développer une politique de bien-être au travail en intégrant toutes les conditions possibles pour développer la qualité de vie sonore et préserver la santé des salariés. En clair, de dépasser le spectre actuel d’analyse qui se réduit bien souvent « à la lutte contre les risques ».
Pour toutes informations : http://www.sante-auditive-autravail.org