Que peut-on attendre d’un projet de Loi qui affiche comme l’un de ses objectifs « une alimentation saine et durable » ? Pour foodwatch, ce projet de Loi était une formidable opportunité pour mieux informer et surtout mieux protéger la santé des consommateurs et des consommatrices. Car aujourd’hui, le lien entre alimentation et santé n’est plus à démontrer. Une occasion manquée. La preuve par trois :
1. Pesticides et autres substances toxiques dans les aliments. La liste des substances chimiques dangereuses pour la santé qui s’invitent dans les produits alimentaires est longue, très longue : résidus de pesticides, perturbateurs endocriniens, nanoparticules, dérivés aromatiques d’huiles minérales, additifs… Or beaucoup n’ont rien à y faire. Si le projet de Loi a timidement abordé la question - par exemple sur le dioxyde de titane - il n’est pas du tout à la hauteur des enjeux. Pire, même l’engagement du Président Macron d’interdire le glyphosate en France en trois ans a été balayé du revers de la main, alors que plusieurs amendements demandaient à l’ancrer dans la Loi.
« La contamination de notre alimentation par des substances chimiques dangereuses n’est pas sérieusement prise en compte. Et ne pas inclure l’interdiction du glyphosate promise par E. Macron est tout simplement incompréhensible. Avec cette Loi, en l’état, l’agrochimie et les lobbies de la malbouffe ont encore de beaux jours devant eux ! », dénonce Karine Jacquemart, directrice de foodwatch.
2. Malbouffe : un enfant sur six en France est en surpoids ou obèse. L’Organisation mondiale de la santé recommande depuis des années de protéger les enfants du matraquage publicitaire. La Stratégie nationale de santé publique pour 2018-2022 le prévoit également. foodwatch a donc proposé un amendement en ce sens qui a été défendu par plusieurs députés : interdire la publicité et le marketing ciblant les enfants de moins de 16 ans pour des produits trop sucrés, trop gras ou trop salés, sur tout support de communication (télé, Internet, etc.). Verdict : l’amendement a été rejeté dimanche, au motif qu’il faut plutôt « responsabiliser les acteurs de l’industrie agroalimentaire ». Qui peut croire sérieusement que les fabricants de produits trop sucrés, gras et salés renonceront à leurs marges et protègeront la santé des enfants ? foodwatch a dénoncé l’inefficacité des engagements volontaires des marques, en épinglant notamment la gamme Lulu L'Ourson du groupe Mondelez.
3. Sécurité sanitaire : les enseignements de Lactalis
Lorsque foodwatch a porté plainte en février dans l'affaire Lactalis, l’organisation avait listé des recommandations pour améliorer la sécurité sanitaire de nos aliments. La Loi agriculture et alimentation a pris une compte une partie d’entre elles, mais peine à marquer un virage vers plus de transparence pour contribuer à restaurer la confiance des consommateurs. foodwatch avait proposé pour cela que l’ensemble des contrôles officiels dans la chaine de production des produits alimentaires soient rendus publics. En vain.
Le texte de la Loi Agriculture et Alimentation peut encore être remusclé dans les prochaines étapes des discussions parlementaires. « Pour le moment, les Etats généraux de l’Alimentation et les ambitions de cette Loi n’ont accouché que d’une souris, qui ne risque pas inquiéter les lobbies de la malbouffe et de l’agrochimie », conclut Karine Jacquemart.