Les propositions de l'Institut national de l'économie circulaire pour développer la bio-économie et l'économie circulaire dans le cadre des États Généraux de l'alimentation

États Généraux de l'alimentation : 5 axes pour que la bio-économie devienne réalité

Par Rédaction -  Théragora

Théragora - www.theragora.fr - Année 2017

Dans le cadre des États généraux de l'alimentation, l'Institut national de l'économie circulaire participe aux réunions de l'Atelier 3 "Développer la bioéconomie et l'économie circulaire". Il y porte une vision globale de l'économie circulaire, s'appliquant à tous les secteurs d'activités et à toutes les échelles, pour un développement durable de l'ensemble de la société. Ses propositions sont issues du groupe de travail Systèmes agricoles et agroalimentaires, réunissant une trentaine d'acteurs provenants d'institutions, d'organismes de recherches et d'entreprises de l'ensemble de la chaine de valeur.


L’économie circulaire est un modèle de développement durable. Elle vise à réduire les quantités de matière et d’énergie utilisées à tous les niveaux d’un système par une optimisation efficiente des ressources et leur utilisation en cycles successifs, afin d’atténuer la pression de l’activité humaine sur l’environnement (prélèvement de ressources et rejet de déchets et polluants). La bio-économie est un secteur d'activité basée sur la biomasse, produite et transformée pour des besoins variés (alimentaire, énergie, chimie... ), comprenant les systèmes agricoles et agroalimentaires.

Appliquée à la bioéconomie, l'économie circulaire vise à assurer une production (alimentaire et non-alimentaire) de qualité et en quantité suffisante, tout en préservant et en régénérant les écosystèmes (biodiversité, sols, eau, air). Cependant il s'agit d'un modèle de développement durable englobant l'ensemble de notre système de production et de consommation, et articulant tous les secteurs dont la bio-économie.

Dans le cadre de l'Atelier "Développer la bio-économie et l'économie circulaire", l'Institut soutient 5 propositions transversales, déclinées en actions plus opérationnelles transmises aux rapporteurs et présidents.

 

1. Mettre en place une Stratégie nationale d’économie circulaire ambitieuse dans laquelle s’inscrira le développement de la bioéconomie

Cette stratégie établira une vision prospective, visant une production et un usage durable de toutes les ressources. Elle est nécessaire pour une bonne gouvernance de la bioéconomie, car la bioéconomie et les autres secteurs d’activité sont interdépendants et ne peuvent être traités uniquement en silos.

Cette stratégie s’appuiera sur l’existant (Plan de programmation des ressources, Stratégies nationales pour la bioéconomie, SN de mobilisation de la biomasse et SN bas carbone). Elle établira une vision à long terme de la demande en biomasse pour les besoins alimentaires et non-alimentaires, y compris les possibilités de substitution de produits issus de sources non renouvelables. Elle fixera un cap et un cadre stable dans le temps, dans lequel pourront s’inscrire les politiques publiques et les stratégies d’acteurs privés.

 

2. Définir les modalités de pilotage territorial d’une valorisation durable et efficiente de la matière organique

Ce pilotage pourra s’inscrire dans les Plans régionaux d’agriculture durable. Il s’appuiera sur un mécanisme de suivi rassemblant les connaissances existantes et anticipant les gisements émergents (tri à la source des biodéchets) pour une connaissance territorialisée des gisements et des usages de la matière organique. S’adaptant aux spécificités des territoires et des acteurs locaux, différentes pistes de valorisation doivent être explorées pour créer de la valeur durablement, ce qui implique de régénérer et d'améliorer les potentiels de production.

 

3. Viser la complémentarité des usages à travers les principes de l’économie circulaire en maintenant le principe d’une hiérarchie d’utilisation de la biomasse

La biomasse doit satisfaire en priorité les besoins alimentaires, suivis des contraintes de nutrition animale et écosystèmes sols, et enfin les besoins industriels. Cependant, il convient de ne pas les opposer et de rechercher une complémentarité par une valorisation en cascade de la biomasse selon les principes de l’économie circulaire, et suivant la priorité de traitement des déchets-ressources pour préserver leur valeur la plus longtemps possible dans la chaine.

 

4. Impliquer l’ensemble des acteurs dans une démarche de développement durable

Les services environnementaux de l’agriculture et de l’agroalimentaire doivent être valorisés : ces externalités positives peuvent être intégrées à travers des mécanismes de fiscalité et l’orientation des aides françaises et européennes. Des campagnes de communication permettraient de sensibiliser les citoyens / consommateurs et les collectivités, et de faire évoluer les comportements. Des démarches d’animation permettront de mettre en place les collaborations et de faire émerger des synergies territoriales autour des ressources.

 

5. Soutenir les orientations nationales au niveau européen, et positionner la France parmi les leaders mondiaux de l'économie circulaire

Sur l’ensemble des normes, réglementations et politiques publiques décidées au niveau national, la France doit défendre ses positions au niveau européen.  En effet, des normes inégales faussent la concurrence et favorisent des pratiques et produits à bas coût moins respectueux de l'environnement, pénalisant les démarches vertueuses. Un positionnement fort dans les accords internationaux et dans les règles d'échanges internationales est également indispensable.

 

Axe 1 : L'utilisation durable des ressources naturelles : un enjeu essentiel pour la mobilisation des secteurs agricoles et agroalimentaires au service de l'économie circulaire
1.1 : Quels rôles et quels enjeux pour les acteurs agricoles et agroalimentaires dans l'objectif global de réduction de la consommation des matières premières non renouvelables ?

Il faut considérer l’objectif global de réduction de la consommation des matières premières non
renouvelables et de gestion durable des ressources renouvelables et dans cette perspective, engager une réforme visant à

Améliorer la connaissance des sols, qui sont une ressource à préserver nécessite :
• de valoriser et de partager les connaissances existantes (de source France Agrimer, INRA, ACTA, Observatoire de la fertilisation minérale et organique, ESCo MAFOR et autres ESCo…) et affiner les connaissances des pratiques de valorisation au sein des exploitations;
• de poursuivre et de financer la recherche dans le domaine, notamment sur la valeur agronomique des produits résiduaires organiques (PRO) et des sous-produits industriels et sur le cycle de l’eau dans les sols (réserve utile);
• de créer un portail informatif sur les différents types de sols et leur potentiel agronomique (teneur en NPK, vitesse de minéralisation, fertilité biologique…) et les bonnes pratiques de gestion des sols dont fertilisation;
• d'Informer et d'éduquer le grand public à une bonne compréhension du rôle des sols.

Mettre en oeuvre des pratiques de gestion durable des sols agricoles (quantité et qualité) passe par la prise en compte de cinq menaces principales : érosion, tassement, artificialisation, salinisation, pollution.
D'où l'intérêt :
• de faire le bilan des mesures existantes1 et de leur efficacité, de les faire évoluer, voir de réglementer si besoin;
•  de renforcer le cadre réglementaire et les mesures incitatives pour préserver les sols agricoles en limitant l’étalement urbain, tout en permettant les installations nécessaires à la valorisation agricole de ces sols;
• de promouvoir les bonnes pratiques en termes de lutte antiérosive ainsi que de préservation et d’amélioration de la qualité des sols (cultures intermédiaires, cultures intercalaires, restitution de résidus de culture, agroforesterie, culture de légumineuses…).

Mettre en oeuvre des mesures de préservation des eaux (quantité et qualité) nécessite aussi de promouvoir :
• les pratiques d’usage parcimonieux de l’eau d’irrigation (goutte-à-goutte, fertirrigation…);
• les pratiques qui limitent les fuites d’éléments nutritifs dans les eaux souterraines (par lixiviation ou lessivage : CIPAN2) et de surface (par ruissellement : infrastructures agro-écologiques…).

Donner une valeur aux services rendus par les activités et les sols agricoles passe également par :
• la valorisation du carbone en tant qu’améliorant de la fertilité des sols et de la biodiversité;
• la mise en place des crédits carbones pour valoriser le stockage du carbone dans les sols (objectif 4/1000);
• l'attribution d'une valeur aux sols pour leur rôle de filtration de l’eau (en particulier dans les zones humides).

Favoriser le développement d’intrants agricoles issus de sources renouvelables et recyclées implique en outre :
• de promouvoir les fertilisants durables issus du recyclage des PRO, l’usage de biostimulants, les alternatives
aux produits phytosanitaires, notamment à travers la communication;
• d'améliorer les connaissances en matière de réutilisation en agriculture des eaux usées traitées, déjà mise
en oeuvre en Europe, et d'adapter la réglementation pour un déploiement sécurisé.

Dans tous les secteurs, favoriser l’adoption de produits issus de la bioéconomie passera par :
• la créationun label français ou idéalement européen des produits issus de la bioéconomie et de l’agriculture circulaire;
• la mise en place des incitations fiscales (TVA);
• l'ncouragement des produits issus de la bioéconomie via la commande publique (former les acheteurs publics, imposer des taux de produits issus de la bio-économie sur certains segments d’achats).

1.2 : Quelles matières organiques (effluents d'élevage, digestats, biodéchets, coproduits et matières résiduaires de l'industrie agroalimentaire, boues de station d'épuration.…) pour quel besoin en agriculture? Comment faire converger les acteurs vers des filières vertueuses ?

Il convient d'harmoniser les normes et les cahiers des charges sur les matières organiques afin d'assurer qualité et innocuité:
• sur les supports de culture et fertilisants pour s’assurer de la conformité des pratiques d’agriculture urbaine;
• par l'hygiénisation des sous-produits organiques via le compostage et les seuils de métaux lourds en adaptant et en harmonisant le contrôle des normes pour toutes les sources (industriel, collectivité, compostage de proximité collectif);
• par le renforcement de la norme NFU 44 051 pour abaisser le niveau d’indésirables (plastique, verre) dans le compost.

Il convient également pour éviter la concurrence déloyale et l’inefficacité des normes nationales :
• de pousser pour la reconnaissance au niveau européen de méthodes alternatives (utilisées en France) aux fertilisants issus de sous-produits animaux;
• d'accélérer les procédures d’examen par l’ANSES de l’autorisation de mise en marché (AMM) pour la rapprocher des délais européens;
• d'améliorer l'implication des autorités nationales dans les travaux en cours sur le nouveau règlement européen harmonisé sur les matières fertilisantes (dont évaluation de l’efficacité).

Sur l’ensemble des réglementations, la France doit défendre ses normes et réglementations au niveau européen, sans quoi l’entrée de produits européens avec des normes inférieures, faussant la concurrence, rendra nulles les décisions prises au niveau national.

Il faut donc favoriser les synergies pour une économie circulaire de la biomasse à différentes échelles (écologie territoriale) et appliquer l’économie circulaire au niveau :
• des exploitations à travers l’encouragement de la polyculture-élevage en adaptant la MAEC3 système polyculture-élevage aux spécificités territoriales;
• des territoires par les complémentarités entre exploitations (spécialisées animales et végétales, aquaponie…)
- en s’appuyant sur une organisation collective (mobilisation des chambres d’agricultures, coopératives, collectivités locales, secteur agro-alimentaire) pour boucler les cycles, mutualiser les procédures de traitement entre exploitations pour plus d’efficience économique et environnementale ;
- en identifiant le niveau d’échelle pertinent pour améliorer le bouclage des cycles, favoriser les circuits courts lorsque cela est possible.

La méthodologie d’accompagnement de ces synergies pourra s'inspirer des pistes évoquées dans les programmes de l’ADEME4 (PNSI, futur programme Concerto) et donc veiller à ce que les programmes et appels d’offres incluent également les PME/TPE.

Il faudra en outre anticiper et accompagner la généralisation du tri à la source des déchets organiques5 en éduquant les citoyens et en les impliquant dans la gestion de la matière organique.

Il conviendra enfin de ne pas remettre en cause : 
• le principe des hiérarchies d’usages de la biomasse (1. alimentaire, 2. nutrition
animale, 3. Industrie) mais rechercher la complémentarité par une valorisation en cascade de la biomasse ;
• le principe de priorité de traitement des déchets (prévention, valorisation de la matière, valorisation énergétique, tout en recherchant la complémentarité par une valorisation en cascades.
Axe 2 : La gestion des déchets d'agrofourniture de l'agriculture et de l’agroalimentaire. Quelle marge de progrès en matière de production de déchets par les secteurs agricole et agroalimentaire ?
Afin d'adapter les statuts et la valorisation des déchets, co-produits / sous-produits à une dynamique d’économie circulaire il est indispensable :
• de clarifier les statuts des déchets et sous-produits pour les secteurs agricole et agroalimentaires, et les conditions de sortie de ces statuts – inclure les spécificités de la bioéconomie dans les réflexions en cours sur les évolutions de la réglementation;
• deréfléchir aux termes sous-produit / co-produit (plus valorisant, et utilisé ailleurs en Europe).

Pour les déchets hors biomasse (déchets non organiques issus des secteurs agricole et agroalimentaires), il faut :
• communiquer sur les solutions de recyclage ;
• mettre en place des incitations fiscales au recyclage ;
• favoriser l’éco-conception des produits/outils/emballages.

Il est urgent enfin de favoriser des produits biosourcés pour réduire à la source la production de déchets et pollutions :
• par la promotion, à titre d’exemple, du  paillage organique ou de l’utilisation de film de paillage biodégradable en remplacement de désherbants chimiques;
• par un bon encadrement de ces produits biosourcés et de leurs propriétés, en interdisant, par exemple, les plastiques oxofragmentables, laissés sur les sols alors qu’ils sont non biodégradables.
Axe 3 : Créer de la valeur par de nouveaux débouchés grâce à la bioéconomie : comment les valorisations nouvelles de la bioéconomie s'articulent durablement avec les usages alimentaires ?
Il est essentiel de mettre en place une Stratégie nationale d’économie circulaire :
• incluant une vision prospective et globale des capacités de production et des besoins de toutes les ressources;
• articulant une stratégie pour la bioéconomie avec les autres filières industrielles : substitution de ressources non renouvelables et interdépendances entre filières (voir propos introductif).

Il faut en outre améliorer la connaissance en soutenant la recherche, le développement et la formation :
• en étudiant les équilibres à trouver entre biomasse exportable et besoins des sols ;
• en menant des études d’impacts sur les productions additionnelles de biomasse et les nouveaux usages de la biomasse ;
• en développant les études d’analyse d’impact pour la bioéconomie telles que
- les analyses de cycle de vie (ACV) mais aussi autres méthodes plus opérationnelles ;
- une vision prospective sur les potentiels d’évolution des produits/technologies/usages, en
particuliers les technologies émergentes – ne pas se contenter d’une comparaison à l’instant t ;
• en incluant une approche bioéconomie et économie circulaire dans les formations agricoles et agroalimentaires.

D'où l'intérêt :
• de mobiliser des financements nationaux et pousser pour une bonne prise en compte de ces sujets dans les fonds européens, notamment H2020 ;
• de s’assurer que les appels à projets couvrent tous les acteurs : abaisser le ticket d’entrée pour les rendre accessibles aux PME/TPE.

Il faut enfin favoriser l’innovation dans la bioéconomie via la mise en oeuvre de l’économie circulaire sur des produits et procédés tels que la bioraffinerie, les supports de culture et biostimulants, biotechnologies issues de la déconstruction de la biomasse (utilisation de toute les parties des plantes) :
• Identifier les débouchés en amont des projets;
• Identifier et lever les freins d’acceptabilité, notamment sociétaux;
• Sensibiliser les citoyens / consommateurs;
• Supprimer les barrières non justifiées, comme les restrictions d’usage déformant la concurrence entre pratiques innovantes et pratiques « installées » (voir harmonisation des normes);
• Pour une mise en oeuvre sur le terrain, développer des démarches territoriales de synergies (voir ADEME : PNSI et Concerto) et les projets multi-acteurs (grands groupes - TPE/PME - acteurs publics).

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