Antoine Bristielle dresse un portrait des anti-vaccins français pour la Fondation Jean-Jaurès, grâce aux résultats de notre enquête « Fractures françaises » réalisée par Ipsos / Sopra Steria pour la Fondation, Le Monde, le Cevipof et l'Institut Montaigne. Résultat : une femme entre 25 et 34 ans, proche des partis politiques extrémistes et défiante envers les institutions politiques et scientifiques. |
Symptôme de cette défiance vaccinale, l'annonce d'un vaccin contre la Covid-19 a été largement concurrencée par la sortie d'un « documentaire » baptisé Hold-Up, rassemblant un ensemble hétéroclite de théories conspirationnistes au sujet de la Covid-19 et d'un potentiel vaccin, qui a été en l'espace de quelques jours partagé abondamment sur les réseaux sociaux.  Il est vrai qu'à l'heure actuelle l'opposition de la population à un potentiel futur vaccin pour lutter contre l'épidémie semble massive. En effet, lorsque l'on demande aux Français s'ils accepteraient de se faire vacciner contre la Covid-19, 24 % répondent qu'ils n'accepteraient probablement pas et 19 % qu'ils n'accepteraient certainement pas, selon des données Ipsos. Pour le dire autrement, une petite moitié de la population française est contre ce vaccin. Ces chiffres ne sont finalement pas étonnants tant depuis quelques années la France est devenue un des �tats d'Europe, voire du monde, les plus sceptiques à l'égard de la couverture vaccinale. Plus particulièrement, l'épisode de la grippe H1N1 aurait ainsi durablement mis à mal la relation entre les Français et les vaccins. Les nombreuses polémiques ayant eu lieu à ce moment-là sur l'opportunité de la vaccination et la révélation de possibles conflits d'intérêts ont enrayé durablement la confiance des Français dans les vaccins. Cela se vérifie encore largement lors de l'épidémie actuelle : comme le montre le graphique 1, la défiance dans un futur vaccin contre la Covid-19 est beaucoup plus importante en France qu'à l'étranger.  Mais qui sont les anti-vaccins français ? Quelles sont les raisons structurelles et conjoncturelles de la défiance vaccinale et comment, in fine, lutter contre ce phénomène ?  Pour répondre à cette question, nous modélisons les attitudes à l'encontre d'un futur vaccin contre la Covid-19, grâce à des données récoltées dans l'enquête « Fractures françaises » coordonnée par la Fondation Jean-Jaurès. L'objectif est ici d'utiliser une méthode statistique qui permette de comprendre, toutes choses égales par ailleurs, les mécanismes profonds expliquant pourquoi certaines personnes sont davantage anti-vaccins et d'autres moins. Pour ce faire, nous effectuons une régression linéaire de l'adhésion au vaccin contre la Covid-19. Cette méthode permet d'avoir un raisonnement « toutes choses égales par ailleurs » : par exemple, si l'âge, le sexe, la catégorie socioprofessionnelle, le niveau de diplôme et le vote à la présidentielle sont similaires, la confiance dans les scientifiques entraîne-t-elle davantage d'acceptation du vaccin contre la Covid-19 ? C'est à ce type de questions que nous sommes en mesure de répondre.  Nous mettons ainsi en lumière plusieurs facteurs influençant l'attitude face au vaccin : l'âge, le sexe, le comportement politique et, finalement, la confiance dans les institutions politiques et scientifiques de notre pays.  L'analyse des résultats d'Antoine Bristielle, démontre que ce sont les femmes qui sont les plus réticentes à se faire vacciner contre le coronavirus, le jour où un vaccin sera disponible, puisqu'elles sont plus de la moitié (50%) quand les hommes sont « uniquement » 35% à le refuser. Plus inquiétant, 52% de la tranche d'âge de 25-34 ans se déclare contre les vaccins, soit plus d'un jeune sur deux. Selon nos données, les anti-vaccins seraient également particulièrement défiant envers les institutions politiques (21% ont confiance dans l'institution présidentielle contre 47%) et scientifiques (62% ont confiance en eux contre 83%). De plus, 35% des anti-vaccins se déclarent contre le port du masque, malgré la démonstration scientifique de son utilité pour lutter contre la propagation du coronavirus. Par ailleurs, les anti-vaccins se retrouvent, notamment, chez les électeurs de Marine Le Pen (52% de ses électeurs refuseraient de se faire vacciner) et de Jean-Luc Mélenchon (43% de ses électeurs refuseraient de se faire vacciner). |