Je savais, j’avais averti, ils ne m’ont pas entendue, ils ne m’ont pas écoutée : Agnès Buzyn ministre de la Santé en Janvier 2020, lorsque la pandémie du COVID était clairement déclarée, selon les experts, dit aujourd’hui sa vérité..Une vérité qu’elle a confiée à son « journal », et dont le Monde a eu connaissance. Jointe par une journaliste, l’ancienne ministre ne mâche pas ses mots. Elle confie au Monde avoir alerté à plusieurs reprises, dès le début de l’épidémie entre janvier et mars 2020. le président de la République et le premier Ministre du risque que pouvait représenter le covid-19 . Sans résultat. Bon, la politique et le monde politique étant ce qu’ils sont, l’ancienne ministre a depuis modéré ses propos, affirmant qu’elle n’en voulait guère au Président et à l’ancien Premier ministre , puisqu’ils n’étaient pas médecins et qu’ils ne pouvaient donc, pas savoir. Les « coupables » étant donc les médecins, qui faisaient la sourde oreille, et Agnès Buzyn de viser directement ainsi les personnalités qui composaient le Conseil scientifiques, convoqué régulièrement par le Président de la République. On ne fera guère reproche à Agnes Buzyn, de pondérer es propos, d’autant que cela ne change rien au fond du problème puisqu’il est évident que le pouvoir exécutif n’a pris conscience, dans un premier temps, de la gravité de la situation.
En fait Agnes Buzyn a compris - un peu tard sans doute - et elle n’a certainement pas tort, qu’elle a été dans cette histoire, « le dindon de la farce » et qu’elle a servi à un moment de faire valoir et de fusible. « On m’a fait passer pour une idiote qui n’a rien vu, alors que c’est l’inverse, affirme-t-elle dans le Monde. Non seulement j’avais vu mais prévenu. J’ai été, de très loin en Europe, la ministre la plus alerte. Mais tout le monde s’en foutait. Les gens m’expliquaient que ce virus était une “grippette” et que je perdais mes nerfs.»
Le fait que l’ancienne ministre ait été mise en examen par la Cour de Justice de la République, alors que le premier Ministre de l’époque, Edouard Philippe, ait été simplement placé sous le statut de témoin assisté, a contribué à cette sourde colère d’Agnès Buzyn. « C’est une femme blessée» commente un député de la majorité présidentielle , pensant ainsi expliquer cette réaction inattendue. Il a tort.. C’est aujourd’hui une femme humiliée. .
C’est une femme qui ne digère pas non plus que tout l’exécutif, le Président de la République, le Premier Ministre aient tout fait pour qu’elle quitte le ministère de la santé et lui fasse miroiter le poste, pourtant inaccessible, utopique même, de Maire de Paris. Elle emploie le terme de "harcèlement "pour la convaincre de quitter son ministère. Ce qu’elle regrette amèrement, encore aujourd’hui.. «Je n’aurais jamais dû partir.. Je le regretterai toute ma vie. A la Santé, j’étais à ma place. Là, on me poussait au mauvais endroit au mauvais moment». Mauvais choix, d’autant que son départ a été mal ressenti par une population qui n’a pas compris qu’un ministre de la santé quitte son poste en pleine crise sanitaire majeure, alors que la pandémie était au plus haut et que les hôpitaux étaient proches de la rupture.
Fin de l’histoire pour Agnès Buzyn, fin d’une vie politique bien courte. Un lot de consolation avec ce poste à la Cour des Comptes, après celui de l’OMS ?.
Le pouvoir politique voudrait il donc calmer ses ressentiments ? Il semble, en tout cas, avoir un peu réussi, puisque l’ancienne ministre met en cause, dans un deuxième temps, surtout les scientifiques et tente d’exonérer les politiques ou du moins d’atténuer leurs responsabilités. .
Il n’empêche. Les accusations sont lourdes et pourraient déboucher sur une éventuelle affaire d’Etat. Du moins si l’opposition et la presse s’en mêlent un peu plus.