Quel rapport les Français entretiennent-ils avec les vaccins ? Pourquoi observe-t-on un niveau de défiance plus important en France qu'ailleurs au sujet de la vaccination ? Quelles politiques publiques faut-il mettre en Â?uvre pour promouvoir la vaccination ? Dans le contexte épidémique que nous vivons, la Fondation, en partenariat avec Conspiracy Watch, s'est penchée sur le sujet. Chloé Morin, politologue, experte associée à la Fondation Jean-Jaurès et Gérard Lambert, médecin généraliste, Thierry Beaudet, président de la Mutualité française et Stéphane Junique, président d'Harmonie Mutuelle, décryptent les résultats de cette enquête.
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Forte notoriété des théories dites « complotistes » autour des vaccins
La Fondation Jean-Jaurès et Conspiracy Watch ont testé cinq affirmations « complotistes » : trois d'entre elles, ci-dessous, sont assez largement connues c'est-à-dire que près de la moitié des Français, voire plus, déclarent « qu'ils en avaient déjà entendu parler ». Cela nous éclaire sur l'ampleur de la propagation des théories sanitaires et notamment vaccinales.
La plus « connue » par les Français est celle qui indique qu'il serait « prouvé que certains adjuvants contenus dans les vaccins, comme l'aluminium, peuvent être très dangereux » (62% en ont entendu parler). La deuxième, 52% des Français en ont déjà entendu parler, c'est celle qui indique que « le ministère de la santé est de mèche avec l'industrie pharmaceutique pour cacher au grand public la réalité sur la nocivité des vaccins ». La troisième, 46 % en ont entendu parler, c'est celle qui indique qu'il existe un lien entre certaines maladies comme l'autisme ou la sclérose en plaques et la vaccination.
Une adhésion considérable aux théories complotistes
Sans surprise, les réticences les plus fortes sont liées aux conflits d'intérêts entre les pouvoirs publics et les industries pharmaceutiques ainsi qu'aux adjuvants contenus dans les vaccins.
- 51% des Français considèrent qu'il est prouvé que certains adjuvants contenus dans les vaccins (notamment l'aluminium) peuvent être très dangereux.
- Un tiers des Français (33%) considère que le ministère de la Santé et les laboratoires pharmaceutiques sont de mèche pour cacher au grand public la réalité sur la nocivité des vaccins. Les moins de 35 ans sont 40 % à croire à cela. 54 % des sympathisants du Rassemblement national et 43 % des sympathisants d'EELV, dont un certain nombre d'élus ont été très en pointe sur ce sujet, croient également à cette théorie.
Une hausse de la confiance envers la vaccination mais une défiance des moins de 35 ans
Deux ans après l'extension vaccinale, les enfants de 0 à 2 ans seront protégés contre onze maladies aux conséquences graves (DTP (diphtérie, tétanos, poliomyélite), la coqueluche, le ROR (Rougeole, Oreillons, Rubéole), l'Haemophilus influenzae de type B, l'hépatite B, le pneumocoque et le méningocoque C). Les thèses complotistes autour de la vaccination reculent : en décembre 2017, 55% des Français pensaient que le ministère de la Santé était de mèche avec les industries pharmaceutiques pour cacher la nocivité des vaccins, en 2020, c'est 33%
D'ailleurs, c'est même la « notoriété » de cette théorie qui a eu tendance à baisser entre 2017 et aujourd'hui : la proportion de Français déclarant en avoir déjà entendu parler a décliné de manière significative au cours des dernières années Â? de 66% en décembre 2017, à 52% aujourd'hui (-14 points). La politique volontariste menée par le gouvernement français depuis 2017, et les professionnels de santé, en matière de vaccination porte ses fruits. La pédagogie et la transparence des pouvoirs publics et des acteurs ont réussi à faire reculer considérablement les théories du complot autour de la vaccination et ont augmenté l'adhésion à l'obligation vaccinale.
Néanmoins, les Français de moins de 35 ans sont toujours très réceptifs aux thèses complotistes autour de la vaccination. Il est nécessaire que les pouvoirs publics, les professionnels de la santé et les acteurs de terrain redoublent d'efforts pour continuer d'augmenter l'adhésion à la vaccination pour tous afin de se protéger soi-même et les autres. Pour cela, la transparence sur la composition des vaccins, sur les effets secondaires, sur les bénéfices de la vaccination, doivent être mis en avant.
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