Les députés débattent de la loi santé

Déserts médicaux : le gouvernement ne veut pas contrarier les médecins sur la liberté d'installation

Par Jacques Degain -  Journaliste

Théragora - www.theragora.fr - Théragora le 18 mars 2019 /FLg N° 19 - Page 0 - crédits iconographique Frantz Lecarpentier

La loi santé qui est discutée depuis ce lundi 18 mars par les députés ne remettra pas en cause la liberté d’installation des médecins, alors même qu’un sondage auprès des français montre que 84 % d’entre eux y seraient favorables dans le cadre de la lutte contre les déserts médicaux. Mais le gouvernement ne veut à l’évidence pas se mettre à dos les médecins libéraux 

 

Le « Grand débat national » l’a souvent montré dans ses réunions régionales ou académiques : la pénurie des médecins dans certains départements ou certaines régions est une préoccupation majeure de la population. Un récent sondage-Fédération hospitalière de France a ainsi monté que 84 % des français étaient partisans d’obliger les médecins à s’installer « dans certains territoires lors de leurs premières années d'exercice pour les répartir plus équitablement ».

Mais le gouvernement n’a pas voulu franchir le pas et la loi santé qui est discutée en ce moment même par les députés écarte prudemment toute mesure de cette nature. Tous les amendements qui allaient dans un sens contraire ont été retoqués en commission parlementaire, suivant ainsi la ministre de la santé. Une telle réforme s’est justifiée  Agnès Buzyn lors de l’émission du  Grand jury RTL serait « simpliste » et ne résoudrait en aucune manière un problème qui demande, selon elle, une réflexion plus approfondie. Reste à savoir laquelle.  Si les médecins et tous leurs syndicats se félicitent de cette déclaration ministérielle, ils n’avancent pas pour autant l’ombre d’une solution. Et cela dure depuis des lustres.

 

Aucune politique cohérente

Pour la ministre, obliger des jeunes médecins fraichement diplômés à s’installer dans des régions qu’ils n’auraient pas choisies, inciterait nombre d’entre eux à fuir la médecine générale, à choisir le salariat, ou à s’orienter vers d’autres disciplines comme la médecine scolaire ou la médecine du travail. Voire à s’expatrier, disent  même certains syndicalistes libéraux. L’argument est à prendre en considération même si rien n’indique pour l’instant que ce mouvement serait si fort qu’il ne résoudrait en aucune manière le problème. Donner des avantages en matière d’honoraires, de charges sociales ou fiscales durant un temps donné à de jeunes médecins qui choisiraient d’exercer dans ces zones sous médicalisés est un axe de réflexion et de concertation qui devrait être abordé plus franchement. Sans doute faut-il privilégier encore plus qu’aujourd’hui  l’incitation économique. Ces axes de réflexion ne datent pas d’aujourd’hui et pour l’instant toutes les mesures incitatives n’ont pas donné des résultats probants. On en convient. Il n’en reste pas moins que le problème de la désertification médicale devient de plus en plus aigu, que les élus locaux, notamment les maires, multiplient les appels aux médecins en leur accordant des avantages non  négligeables pour qu’ils s’installent dans leurs villes ; mais cela ne fait pas une  politique nationale cohérente. Faire de la surenchère régionale, au détriment du voisin, pour attirer des médecins n’a jamais été constructif sur la durée.

Des députés proposent que des étudiants en fin d’études fassent un stage obligatoire dans des régions en mal de médecins. La proposition mérite au moins d’être débattue. Mais déjà la ministre fait la moue et n’est guère enthousiaste si l'on en croit ses dernières déclarations ; intéressant, dit-elle poliment, mais pas question que cela devienne une obligation. En clair, pas question pour le gouvernement d’accepter un tel amendement, même s’il provient d’un membre de sa majorité… On n’avance pas.

Chiche que l’on en reparlera dans dix ans…Attention cependant au retour de bâton.

 

   

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