L'Académie nationale de médecine souligne notamment :
- la fragilité particulière de ces patients, liée à la fréquence des déficits organiques associés et à la difficulté de leur faire observer les gestes barrières ou de recourir aux soins que leur état de santé nécessite, du fait de l'inhibition due à leur pathologie et aux traitements ;
- l'application difficile des mesures de confinement en chambre chez les malades mentaux hospitalisés quand la prévention de la contagion l'exige ;
- le risque important de rupture du suivi et des soins, donc de rechute, chez les malades mentaux suivis en ambulatoire en raison d'une moindre accessibilité des consultations, et ses conséquences sur leur état de santé et sur leur entourage ;
- le risque de transmission nosocomiale du SARS-CoV-2 dans les établissements psychiatriques comme dans tous les établissements de santé.
Au total, l'ampleur de la situation épidémique actuelle expose les patients psychiatriques à une perte de chance consécutive à un éventuel abandon des soins. Cette préoccupation majeure concerne aussi tous les sujets présentant des symptômes de souffrance psychique (anxiété, dépression, angoisses, voire bouffées délirantes, pensées suicidaires, ...) favorisés par les conditions de confinement.
L'ensemble de ces constatations, déjà soulignées avec inquiétude par de nombreux psychiatres, conduit l'Académie nationale de médecine à recommander :
de ne pas négliger les professionnels en charge de la santé mentale lors de la mise à disposition des matériels de protection contre la transmission nosocomiale aérienne et manuportée (masques, tenues et lunettes de protection, gels hydroalcooliques, ...). Ceci implique que les agences régionales de santé (ARS) et les groupements hospitaliers de territoire (GHT) répondent sans retard et sans discrimination aux demandes émises par les structures de soins psychiatriques en vue de prévenir au mieux la transmission croisée du SARS-CoV-2 entre soignants et patients.
de s'assurer que les patients porteurs d'une affection psychiatrique chronique (schizophrénie, bipolarité...) et suspects de Covid-19 bénéficient d'une surveillance efficace à domicile et que, en cas d'aggravation, ils puissent accéder sans délai et sans stigmatisation aux soins médicaux hospitaliers, voire à l'hospitalisation en soins intensifs et réanimation si nécessaire.
d'organiser une prise en charge ambulatoire des patients psychiatriques dans chaque site, par téléconsultation ou consultation téléphonique, avec des praticiens hospitaliers et libéraux et de faire connaître ces moyens d'accès par une large diffusion dans les médias, la presse locale et internet.
Académie nationale de médecine le 20/04/2020